CHILDREN OF THE CORN : RUNAWAY (2018)

Changement de style et d’atmosphère pour ce dixième épisode plus intimiste et plus psychologique que les autres…

CHILDREN OF THE CORN : RUNAWAY

 

2018 – USA

 

Réalisé par John Gulager

 

Avec Marci Miller, Jake Ryan Scott, Mary Kathryn Bryant, Lynn Andrews, Diane Ayala Goldner, Eric Starkey, Daria Balling

 

THEMA ENFANTS I DIABLE ET DÉMONS I SAGA LES DÉMONS DU MAÏS I STEPHEN KING

La saga multiforme inspirée de la nouvelle « Les Enfants du maïs » de Stephen King s’enfonçait lentement mais sûrement dans le grand n’importe quoi jusqu’à un intéressant reboot réalisé par Donald P. Bochers en 2009. Mais deux ans plus tard, Joel Soisson signait une nouvelle séquelle à l’intérêt tout relatif, Les Enfants de l’horreur – la genèse. Si Soisson est un indiscutable amoureux du fantastique et de l’horreur, on ne peut pas dire que son œuvre brille par sa finesse, qu’il agisse en tant que réalisateur (les reshoots de Maniac Cop 3, Pulse 2 et 3, The Prophecy : Uprising, The Prophecy : Forsaken) ou que scénariste / producteur (Highlander : Endgame, Dracula 2001, Mimic 2, L’Homme sans ombre 2). Le savoir à l’œuvre sur l’écriture de Children of the Corn : Runaway n’était donc pas particulièrement rassurant. À cette occasion, il retrouve le réalisateur John Gulager, qui avait signé en 2012 Piranha 3DD, séquelle éléphantesque du Piranha 3D d’Alexandre Aja écrite justement par Soisson. Les deux hommes n’étant pas particulièrement caractérisés par leur subtilité, ce dixième Children of the Corn laissait craindre le pire. Or contre toute attente, cet opus dont personne n’attendait plus rien nous surprend par son traitement intimiste et ses interprètes d’une grande justesse.

Le film s’amorce comme la chronique réaliste et désenchantée d’une misère banale, celle d’une mère célibataire et de son fils de 13 ans, vivotant sans ressources mais sans misérabilisme au cœur de l’Amérique profonde. Ancien membre du culte des enfants meurtriers de Gatlin dans le Nebraska, Ruth est tombée enceinte alors qu’elle était encore adolescente. La trouille au ventre, elle s’est enfuie avec son fils Aaron, lui cachant tout des horreurs de son passé. Ils vivent depuis sur les routes, la plupart du temps dans leur camionnette. Leur véhicule étant immobilisé par la police, tous deux sont contraints de s’établir momentanément en Oklahoma où Ruth trouve un petit travail de mécanicienne chez un garagiste. Mais le culte des adorateurs du maïs semble toujours être à leur recherche. Ces enfants qui rodent aux alentours – et notamment cette petite fille au regard faussement paisible – sont-ils venus pour convertir Aaron à leurs sanglantes coutumes ? À moins que tout se passe dans la tête de Ruth. Bientôt, il devient de plus en plus difficile de faire la part entre la réalité et les hallucinations cauchemardesques…

Une si gentille petite fille

Children of the Corn : Runaway se distingue d’abord par sa mise en scène brute et instinctive, doublée d’une approche sensible et à fleur de peau des personnages et de leurs failles. C’est par petites touches subtiles que le film décrit ainsi la complicité qui se noue entre ces deux êtres démunis mais qui vont sans cesse de l’avant : la mère dure à cuire prête à tout pour protéger son enfant et le fils dont la maturité s’est accélérée par la force des choses. Pour peu, on en oublierait pendant un moment que nous avons affaire à un film fantastique. Le genre n’est d’ailleurs pas immédiatement abordé de manière frontale. Certes, lorsque les premiers enfants débarquent et montrent leur frimousse un peu partout, le malaise s’installe insidieusement. Mais les choses sont compliquées par l’esprit troublé de Ruth, qui mêle les hallucinations issues de son passé avec celles qui transfigurent le présent. D’autant que son statut de paria se heurte à la bigoterie et l’intolérance d’une communauté cachant derrière ses bonnes manières des idées d’un autre âge (à ce titre, la scène de la directrice d’école est édifiante). Au fil du film, l’horreur surgit avec parcimonie mais intensité, construisant pas à pas un coup de théâtre habile nous transportant sur le terrain de la psychose. Très différent des autres opus de cette saga multiforme, Children of the Corn : Runaway aurait d’ailleurs pu tout à fait exister de manière indépendante, sans forcément se rattacher à la franchise née en 1984.

 

© Gilles Penso


Partagez cet article