Pour varier les plaisirs, les studios Marvel sollicitent un super-héros peu connu maître des arts martiaux…
SHANG-CHI AND THE LEGEND OF THE TEN RINGS
2021 – USA
Réalisé par Destin Daniel Cretton
Avec Simu Liu, Awkwafina, Tony Leung, Ben Kingsley, Meng’er Zhang, Fala Chen, Michelle Yeoh, Wah Yuen, Florian Munteanu
THEMA SUPER-HÉROS I DRAGONS I SAGA MARVEL COMICS I MARVEL CINEMATIC UNIVERSE
Pour le vingt-cinquième long-métrage de leur « Cinematic Universe », les studios Marvel s’intéressent à un personnage beaucoup moins connu que ses homologues masqués, mutants et cuirassés, en l’occurrence Shang-Chi. Né dans les années 70 sous la plume de Steve Englehart et les coups de crayon d’Al Milgrom et Jim Starlin, ce héros asiatique surgit dans les pages des BD Marvel en réponse à la vogue croissante des films de kung-fu. Bruce Lee est d’ailleurs l’une des influences majeures de l’équipe ayant présidé à sa création. Dès la fin des années 80, Stan Lee envisage de porter à l’écran ce justicier maître des arts martiaux et vise dans le rôle principal Brandon Lee, le fils de Bruce Lee (futur héros de The Crow). Mais le projet n’aboutit pas. Au début des années 2000, une nouvelle tentative d’adaptation est initiée, cette fois-ci par Dreamworks. Stephen Norrington et Yuen Woo-Ping sont tour à tour envisagés derrière la caméra, sans que le film ne puisse voir le jour. Il faut donc attendre que Marvel récupère les droits d’adaptation pour que Shang-Chi crève enfin les écrans. Au-delà de l’éventuel intérêt scénaristique d’un tel film, la démarche est culturelle, sociale et politique. Shang-Chi et la légende des dix anneaux est en effet un moyen pour la puissante compagnie de production de mettre à l’honneur la communauté asiatique, comme elle l’avait fait avec la culture africaine à l’occasion de Black Panther. C’est le réalisateur d’origine hawaïenne Destin Daniel Cretton, jusqu’alors spécialisé dans le cinéma indépendant, qui hérite de la réalisation de Shang-Chi dont il co-écrit l’histoire avec Dave Callaham.
Shaun (Simu Liu) vit à San Francisco comme modeste voiturier. Sa sœur Xialing (Meng’er Zhang) s’est établie à Macao où elle dirige un cercle de combats clandestins. Tous deux n’ont rien en commun, sinon un père superpuissant (Tony Leung) détenteur de dix anneaux qui le dotent de pouvoirs surnaturels depuis des siècles. Le jour où ce dernier envoie aux trousses de ses deux enfants de redoutables hommes de main chargés de récupérer les médaillons qu’ils portent autour du cou, Shaun et Xialing sont obligés de recroiser leur chemin, à l’occasion de retrouvailles musclées et dévastatrices. Mais le frère et la sœur vont devoir oublier leurs différences et leurs dissensions s’ils veulent avoir une chance d’affronter leur père, persuadé que sa défunte épouse l’appelle depuis l’au-delà. Pour la retrouver, il est prêt à tout, y compris raser un village entier et ses habitants…
Le soufflé retombe
La première partie de Shang-Chi laisse planer beaucoup d’espoirs. Les personnages y sont attachants, joués avec finesse, constellant leurs dialogues de petites touches d’humour bienvenues (la complicité établie entre les personnages qu’incarnent Simu Liu et Awkwafina fonctionne bien). Lorsque la comédie urbaine cède le pas à l’action, tous les excès sont permis avec une générosité rafraîchissante : une scène de combat hallucinante dans un bus (sorte de mixage délirant entre Speed et Crazy Kung-fu) puis une bataille sauvage à flanc d’immeuble avec son lot d’effets vertigineux et de chutes dans le vide. Hélas, toute cette belle énergie se met au service d’un scénario sans queue ni tête aux rebondissements invraisemblables. On s’entretue puis on se tombe dans les bras, on se déteste puis on s’adore, sans motivation ni logique. Au bout de trois quarts d’heure de métrage, le soufflé retombe donc et l’on repart dans une histoire de légende séculaire, de destin et de magie, le tout expliqué par d’interminables dialogues que déclament Tony Leung et Michelle Yeoh. Terriblement sous-exploités, ces immenses acteurs conservent malgré tout leur charisme. On ne peut malheureusement pas en dire autant de l’immense Ben Kingsley, dont la prestation s’avère ici très embarrassante. La dernière partie du film nous transporte dans une forêt enchantée disneyenne gorgée de créatures magiques où semblent s’entremêler les influences de Dragonball, L’Histoire sans fin et Les Monstres de l’apocalypse. Tous ces déchaînements numériques nous laissent donc froids et distants, annihilant le potentiel que laissait entrevoir l’entame du film.
© Gilles Penso
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