Mel Brooks réinvente Star Wars à sa sauce en concoctant un space opéra délirant qui – paraît-il – fit beaucoup rire George Lucas…
SPACEBALLS
1987 – USA
Réalisé par Mel Brooks
Avec Mel Brooks, Rick Moranis, Bill Pullman, John Candy, Daphne Zuniga, Joan Rivers, Dick Van Patten, John Hurt
THEMA SPACE OPERA
Au fil de sa carrière de réalisateur, Mel Brooks a eu l’occasion de pasticher un grand nombre de genres cinématographiques : la comédie musicale (Les Producteurs), le western (Le Shérif est en prison), l’épouvante (Frankenstein junior), le suspense hitchcockien (Le Grand frisson), le péplum (La Folle histoire du monde). La science-fiction manquait à l’appel, et il était temps de combler cette lacune, surtout après que la trilogie Star Wars ait bouleversé à tout jamais l’histoire du cinéma populaire. Pour son huitième long-métrage, le trublion s’attelle donc à Spaceballs, six ans après La Folle histoire du monde. Le titre français entretient d’ailleurs un lien artificiel entre les deux, jouant sur le fait que la fin du film précédent montrait une séquence spatiale entrée dans la légende, « Les Juifs dans l’espace ». Doté par le studio MGM d’un budget de 22 millions de dollars (le plus gros de sa carrière), Brooks s’apprête à parodier La Guerre des étoiles et ses deux suites et, pour éviter tout problème juridique, en informe personnellement George Lucas. Ce dernier n’y voit pas d’inconvénient, à condition qu’aucun produit dérivé de Spaceballs ne soit commercialisé. Le père de Luke Skywalker craint en effet que des figurines ou des jouets issus du film de Mel Brooks soient confondus avec ceux de la saga Star Wars. Les deux hommes tombent d’accord et La Folle histoire de l’espace entre officiellement en production.
Alors que retentit une musique symphonique de John Morris pleine d’emphase imitant le style de John Williams, un texte annonçant l’épisode 11 défile sur fond spatial. Le résumé introductif se termine par : « si vous pouvez lire ça, vous n’avez pas besoin de lunettes ». Puis entre dans le champ un interminable vaisseau spatial qui prend tout son temps pour traverser l’écran (on dirait l’une des fameuses limousines à rallonge de Tex Avery). La musique se met alors à plagier celle des Dents de la mer, car l’engin a les allures d’un requin démesuré. Nous sommes dans une galaxie très lointaine. Les redoutables Spaceballs ont épuisé tout l’oxygène de leur planète et convoitent désormais celui des habitants de Druidia. Ils cherchent donc à kidnapper la princesse Vespa (Daphne Zuniga) pour faire chanter son père le roi Roland (Dick Van Patten). L’opération est dirigée par le Seigneur Casque Noir (Rick Moranis). En désespoir de cause, le mercenaire Lone Starr (Bill Pulman) et son co-pilote homme-chien Barf (John Candy) sont embauchés pour partir à sa rescousse…
Le délire contre-attaque
La Folle histoire de l’espace nous offre une galerie de personnages joyeusement délirants qui déclinent, mélangent ou réinventent ceux de la saga de George Lucas. Encore inconnu du grand public, Bill Pullman incarne une sorte de mixage entre Han Solo et Indiana Jones (les dialogues font d’ailleurs allusion au Temple maudit), flanqué d’un John Candy au faciès semi-canin et à la queue encombrante (substitut potache de Chewbacca). Tous deux voyagent à bord d’un camping-car volant et ont maille à partir avec le redoutable Pizza the Huth (au maquillage outrageusement dégoulinant) auprès de qui ils sont endettés. La princesse Vespa (Daphne Zuniga, qui jouera deux ans plus tard dans une autre production de Brooks, La Mouche 2) est quant à elle accompagnée de la demoiselle d’honneur robotique Dot Matrix, version en jupette de C3-PO (qui était d’ailleurs un robot féminin dans les premiers designs de La Guerre des étoiles). Quant à Mel Brooks, il joue à la fois le vil président Esbrouffe et le vieux sage Yogurt. Toute cette distribution haute en couleurs est dominée par Rick Moranis, absolument désopilant en super-vilain mégalomane perdu dans son casque surdimensionné. Quelques-uns des meilleurs gags le concernent, notamment son visionnage de la cassette VHS de La Folle histoire de l’espace pour savoir ce qui se passe dans les scènes suivantes ou son jeu puéril avec les figurines du film. Le cinéaste semble ici faire un pied de nez à George Lucas et à son amour du merchandising, même si en la matière la séquence la plus ironique est celle où Yogurt et ses assistants nains exposent une boutique pleine de produits dérivés estampillés Spaceball. D’autres clins d’œil savoureux (notamment à Alien et La Planète des singes) ponctuent le film. Selon Mel Brooks, George Lucas lui aurait envoyé un courrier affirmant qu’il éclata tellement de rire en voyant La Folle histoire du monde qu’il faillit tomber à la renverse. Nous serions tentés de le croire.
© Gilles Penso
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