L’histoire glauque, malsaine et gore d’un jeune homme qui embaume le corps de sa défunte fiancée et bascule dans la folie meurtrière…
BUIO OMEGA
1979 – ITALIE
Réalisé par Joe d’Amato
Avec Kieran Canter, Cinzi Monreale, Franca Stoppi, Sam Modesto, Anna Cardini, Lucia D’Elia, Mario Pezzin, Walter Tribus, Klaus Rainer
THEMA TUEURS
Aristide Massacessi (plus connu sous son pseudonyme de Joe d’Amato) commença sa carrière au début des années 70 en tournant quelques westerns spaghetti modestes avant de se spécialiser dans l’érotisme. Après avoir affiché à sa filmographie une vingtaine de titres délicieux tels que Emmanuelle et Françoise, Black Emanuelle en Orient, Voluptueuse Laura, Les amours interdites d’une religieuse ou Le Gynécologue de ces dames (et oui !), il décida à la fin de cette décennie décomplexée de s’adonner à un autre genre alors très en vogue : l’horreur. Sa première incursion dans ce domaine portait encore les stigmates de sa spécialité première, puisqu’il s’agissait d’Emanuelle et les derniers cannibales, où le gore s’immisçait entre deux scènes de fesses. En 1980, il allait mixer une fois de plus les genres avec La Nuit fantastique des morts-vivants (connu aussi sous le titre de La Nuit érotique des morts-vivants). Mais en s’attaquant à Blue Holocaust, d’Amato souhaite mettre en scène un film d’horreur pur et dur, sans se départir bien sûr de son goût pour la provocation et pour sa propension à repousser les limites de ce qui est montrable sur un écran de cinéma (en ce sens, il ira très loin l’année suivante avec Anthropophagous, son « œuvre phare »).
Blue Holocaust s’appuie sur un scénario d’Ottavio Fabbri lui-même tiré d’une histoire originale de Giacomo Guerrini. Anna (Cinzi Monreale), la fiancée chérie de Francesco (Kieran Canter), est à l’hôpital et va mourir. Francesco ne peut admettre que ce corps tant aimé puisse être enterré et perdu à jamais. Après avoir subrepticement injecté dans le corps d’Anna un sérum pour sa conservation, il va, le soir même de l’enterrement, déterrer le cadavre pour le ramener chez lui et l’embaumer. Dès lors, il installe dans son lit ce corps inanimé pour qui il perd complètement la tête. Ne sachant plus à quel sein se vouer, notre homme trouve refuge dans le corsage de la gouvernante (Franca Stoppi) qui l’a élevé depuis qu’il est enfant et avec qui il entretient d’étranges rapports à la lisière de l’inceste. Puis il bascule dans la folie meurtrière, assassinant toutes les jeunes femmes qui auront la faiblesse de lui céder avant de découper méthodiquement leur cadavre et d’en dissoudre les morceaux dans une baignoire pleine d’acide…
À gore et à travers
Plutôt qu’exploiter pleinement le potentiel de cette histoire trouble, d’Amato s’en sert simplement de fil conducteur pour relier entre elles chacune des scènes d’horreur. On sent bien que le cinéaste n’attache que peu d’importance à la rigueur narrative, quitte à multiplier les invraisemblances. Ainsi, alors que Francesco trimballe dans sa camionnette le cadavre de sa dulcinée pour l’embaumer, il commet l’erreur de prendre une auto-stoppeuse. Au lieu d’essayer de s’en débarrasser au plus tôt, il la laisse endormie dans son garage, enlève le cadavre sous son nez et commence tranquillement l’embaumement. Après avoir vidé les viscères d’Anna (images chirurgicales intercalées à l’appui), Francesco replace les yeux préalablement énucléés sur le visage de l’actrice (ses paupières closes ont été peinturlurées en noir pour simuler des orbites vides). Quant à la longue cicatrice que Francesco a faite sur le corps d’Anna, elle apparaît et disparaît au bon gré du montage. Lorsqu’enfin l’auto-stoppeuse (que tout le monde avait oublié) se réveille et comprend à qui elle a affaire, la voilà qui demande au dément de lui ouvrir la porte, plutôt qu’essayer de s’enfuir. Las d’être dérangé en plein travail (on le comprend), Francesco lui arrache les ongles, sur lesquels les gros plans deviennent subitement flous, comme si le cadreur perdait la maîtrise de son focus. Une autre victime, dont la gorge a été arrachée, trouve encore le moyen de gesticuler dans un four crématoire ! Tout le film est à l’avenant, assumant son laxisme et son mauvais goût sur le tempo entêtant d’une bande originale inventive signée par le groupe Goblin.
© Gilles Penso
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