Un prolongement nostalgique, surprenant, drôle et émouvant du film culte de 1984, signé par le fils du réalisateur original…
GHOSTBUSTERS : AFTERLIFE
2021 – USA
Réalisé par Jason Reitman
Avec McKenna Grace, Finn Wolfhard, Carrie Coon, Paul Rudd, Logan Kim, Celeste O’Connor, Bokeem Woodbine, Tracy Letts, Oliver Cooper
THEMA FANTÔMES I SAGA S.O.S. FANTÔMES
Oubliez le S.O.S. fantômes de 2016, un remake/reboot vain et à côté de la plaque sans âme ni vision. Oubliez même le S.O.S. fantômes 2 de 1989, une suite certes sympathique mais fixant déjà les limites d’un concept qui ne nécessitait pas de prolongements au-delà du film original. Le premier S.O.S fantômes était un miracle, un de ces moments de grâce rares où s’entrechoquaient la comédie et le fantastique sur la base d’une idée potache imaginée par Dan Aykroyd, co-écrite avec Harold Ramis, mise en scène par Ivan Reitman, portée par le charisme pince sans rire de Bill Murray, le grain de folie de Rick Moranis, le charme fou de Sigourney Weaver… Bref une conjonction de talents qui étaient là au bon endroit, au bon moment, et qui ravagèrent tout sur leur passage en 1984. Il faut pourtant croire qu’il y avait encore une histoire à raconter autour de ces chasseurs de fantômes, à condition d’y insuffler un souffle nouveau. Et pour s’emparer de cet héritage, comment imaginer mieux que Jason Reitman ? Non content d’être le fils du réalisateur original, Reitman Jr a révélé son propre talent avec des films d’une grande fraîcheur comme Thank You For Smoking, Juno ou In the Air. Restait à trouver un script cohérent jetant un pont entre le mythe créé en 1984 et les mentalités des années 2020. Jason Reitman s’associe donc avec Gil Kenan (Monster House, La Cité de l’ombre, Poltergeist 2015) pour co-écrire un récit en quête du juste équilibre.
Après un prologue plus volontiers axé sur l’épouvante que sur la comédie, et portant déjà en germe un certain nombre d’indices échappés du tout premier Ghostbusters, le ton et le décor changent du tout au tout. Nous découvrons une famille monoparentale en équilibre instable : Callie (Carrie Coon), une mère endettée et dépassée par les événements qui ne parvient plus à joindre les deux bouts ; Phoebe (McKenna Grace), une gamine passionnée par les sciences au point de vivre un peu enfermée dans son monde ; et Trevor (Finn Wolfhard), un adolescent qui cherche sa place, coincé dans cette période charnière à mi-chemin entre l’enfance et l’âge adulte. Le fait que ce dernier soit incarné par l’un des héros de Stranger Things et du Ça d’Andres Muschietti aurait pu laisser imaginer une volonté d’inscrire S.O.S. fantômes l’héritage dans cette mouvance récurrente du revival des années 80 façonnée par des œuvres comme le Super 8 de J.J. Abrams. Or si la nostalgie constelle effectivement la quasi-totalité du métrage, ce n’est pas à via un mimétisme stylistique des eighties mais plutôt à travers le thème de la transmission. Acculée, Callie est ainsi obligée de quitter la ville avec ses enfants pour s’établir dans la vieille maison qui appartenait à son père, dans une petite ville du fin fond de l’Amérique où il passait pour un vieux fou misanthrope et paranoïaque. Or c’est là, sous les couches de poussière de leur nouveau logement précaire, que les enfants découvrent un équipement de chasse aux fantômes…
Les fantômes du passé
S.O.S fantômes : l’héritage ne réitère pas le coup d’éclat du film original et ne s’inscrira évidemment pas dans l’inconscient collectif avec autant d’impact. Mais là n’est pas son intention. Au lieu de chercher à imiter les péripéties et les situations du premier S.O.S. fantômes, le film de Reitman Jr s’inscrit dans son prolongement et décline d’un bout à l’autre l’idée de la passation. Presque tout l’attirail iconique de rigueur est bel et bien là (l’ambulance estampillée du logo rouge et blanc, les panoplies des chasseurs de fantôme et leurs canons à effluves, une grande partie du bestiaire d’antan, une belle brochette de guest-stars) mais transporté dans un contexte rigoureusement différent (la grande ville cède le pas à une bourgade digne d’un western) face à des héros qui n’ont rien à voir avec le quatuor de 1984. Les protagonistes ne sont plus des scientifiques excentriques reconvertis en dératiseurs d’ectoplasmes mais des enfants assumant comme ils peuvent les responsabilités léguées par leurs aînés. Avec ce qu’une telle idée comporte de rires, de frissons et d’émotion. Car entre deux séquences ultra-spectaculaires ou joyeusement absurdes, une larmichette finit par perler chez des spectateurs qui n’imaginaient sans doute pas voir sollicitée leur corde sensible. Plus le film s’achemine vers son climax, plus il nous semble que tout le monde – l’ancienne et la nouvelle génération – ne s’est réuni que pour une seule raison fondamentale : rendre un ultime hommage au scénariste/réalisateur/comédien Harold Ramis, désopilant chasseur de spectres parti rejoindre en 2014 les fantômes du passé.
© Gilles Penso
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