Dans cette série B à tout petit budget, une expédition scientifique part à la chasse au monstre dans les montagnes de l’Himalaya
THE SNOW CREATURE
1954 – USA
Réalisé par W. Lee Wilder
Avec Paul Langton, Leslie Denison, Teru Shimada, Robert Kino, Rollin Moriyama, Bill Phipps, Rudolph Anders, Darlene Fields
Artisan d’une série de films de science-fiction bon marché mais ambitieux (Le Fantôme de l’espace, Les Tueurs de l’espace), W. Lee Wilder se lança au milieu des années 50 dans L’Abominable homme des neiges, une histoire de yéti à vocation réaliste, voire quasi-documentaire dans sa première partie. D’où une poignée d’images d’archives et la voix-off du héros-narrateur structurée à la manière d’un carnet de bord. Son auteur, Frank Parrish, est un éminent botaniste venu étudier la flore des montagnes de l’Himalaya. Dans ce but, il a mis sur pied une petite expédition constituée d’un ami photographe et d’une dizaine de Sherpas, dont un guide parlant plus ou moins anglais. Les premiers jours d’exploration s’avèrent décevant, la végétation locale n’offrant que peu d’intérêt, mais Parrish est tenace. Soudain, au beau milieu de la nuit, surgit une grande créature velue humanoïde. Suivant la trace des grands monstres classiques qui le précédèrent, il avance d’un pas traînant, fait hurler d’épouvante une femme qui s’évanouit aussitôt, puis l’emporte dans ses bras dans un but et une destination qui nous échappent quelque peu.
Incapable de se payer un costume et un maquillage de yéti dignes de ce nom, le réalisateur prend le parti de le plonger constamment dans l’ombre sans jamais montrer son visage. Ce choix de mise en scène « par défaut » renforce finalement l’aspect documentaire du film, surtout lorsque la silhouette de l’abominable homme des neiges se détache sur les rochers à l’horizon, très proche des fameux films amateurs tournés jadis par de soi-disant témoins oculaires. Coincé par un timing et un budget étriqués, Wilder abuse cependant jusqu’à l’épuisement d’un plan inlassablement répété, dans lequel le yéti avance lentement vers la caméra, la figure savamment occultée par la pénombre. L’époux de la malheureuse kidnappée n’est autre que le guide de l’expédition. Il mène alors une « mutinerie », obligeant le biologiste à transformer son expédition scientifique en chasse au monstre.
Un Yéti dans la ville
Ce postulat n’est pas plus mauvais qu’un autre, mais le récit qui s’ensuit s’avère terriblement peu palpitant, alternant avec langueur les scènes de marche dans la montagne, de campement nocturne et d’apparitions furtives du yéti. L’intérêt est heureusement relancé par la capture de l’homme des neiges et son acheminement à Los Angeles. Le scénario prend alors une tournure devenue classique depuis Le Monde perdu et King Kong, c’est-à-dire le monstre ramené à la civilisation et s’échappant pour semer la panique en ville. Sur le papier, l’idée d’un yéti terrorisant piétons et automobilistes avait de quoi stimuler les esprits. Mais dans les faits, cette seconde partie s’avère à peine moins terne que la première, tant la mise en scène de Wilder manque de panache et de dynamisme. Ainsi l’inspecteur de police chargé de l’enquête passe-t-il le plus clair de son temps assis dans un bureau à attendre ou à montrer une carte de Los Angeles pour suivre les évolutions du monstre. On ne s’étonnera donc pas que le climax situé dans les égouts fasse l’effet d’un pétard mouillé et que le film lui-même n’ait guère marqué les mémoires.
© Gilles Penso
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