Une femme à la recherche de ses origines découvre la maison vétuste que possédaient ses parents biologiques et sombre dans le cauchemar…
THE ABANDONNED
2006 – ESPAGNE
Réalisé par Nacho Cerda
Avec Anastasia Hille, Karel Roden, Valentin Ganev, Carlos Reig, Jordanka Angelova, Kalin Arsov, Paraskeva Dijukelova
THEMA FANTÔMES
Nacho Cerda est partisan d’un cinéma fantastique profond et dénué de concessions, comme le prouvaient ses courts-métrages percutants, notamment Aftermath et Genesis. En passant au format long, il conserve sa ligne directrice et concocte un film de fantômes d’autant plus touchant qu’il est sincère et viscéral. Refusant les têtes d’affiches (malgré les insistances des producteurs de Filmax qui rêvaient de Nastassja Kinski ou Holly Hunter), Cerda donne le premier rôle à Anastassia Hille (aperçue dans The Hole), qui incarne à la perfection Marie, une productrice de cinéma américaine en quête de ses origines. Adoptée et emmenée aux États-Unis juste après sa naissance, elle décide, à quarante ans, de revenir dans sa Russie natale. Elle vient en effet d’hériter de la maison de ses défunts parents biologiques, une ferme isolée au beau milieu des montagnes. Abandonnés, les lieux ont fort mauvaise réputation et les autochtones, par ailleurs peu engageants, prétendent qu’ils sont hantés. Un homme accepte d’accompagner Marie jusqu’à la vénérable demeure, mais il disparaît mystérieusement en chemin et c’est seule qu’elle explore le site, sinistre à souhait. Elle y découvre Nikolaï (Karel Roden, vu dans Blade 2 et Hellboy), un homme étrange qui prétend être son frère jumeau. C’est là que le cauchemar commence…
« Ce n’est pas parce que vous avez tiré un trait sur le passé que le passé a tiré un trait sur vous » prononce une voix off en guise d’introduction. Et ce sont effectivement les fantômes du passé qui vont venir harceler notre héroïne… A moins que ce ne soient les prémonitions d’un futur proche épouvantable ? Avec la minutie d’un orfèvre et la virtuosité d’un concertiste, Cerda capte la peur avec sa caméra et ne la quitte plus d’une semelle. Pétrifiée par une angoisse trop familière, prisonnière d’un lieu qui n’offre aucune échappatoire et se dérobe aux notions rassurantes de l’espace et du temps, Marie s’avère bien incapable d’échapper au piège qui se referme sur elle. Et lorsqu’elle distingue une silhouette effrayante qui lui tourne le dos et prend lentement la fuite dans les recoins sombres de la maison hantée, c’est sa propre mort qu’elle est sur le point d’affronter.
Les fantômes du passé
Partant d’un postulat simple, l’intrigue se noue peu à peu et se complexifie au fur et à mesure des déambulations de Marie, suivie pas à pas par des spectateurs en totale phase d’identification. Jouant sur les atmosphères poisseuses et les peurs basiques, distillant parcimonieusement les visions d’horreur et l’hémoglobine, le cinéaste s’appuie sur des comédiens extraordinaires, tout en sobriété et en justesse. Bien que les cinéastes espagnols taquinant le genre fantastique réfutent généralement l’appartenance à un groupe géographique donné – « Nous avons vu les mêmes films que les réalisateurs français, anglais ou américains de notre génération », nous disait à ce propos Paco Plaza, « et nous n’avons pas plus d’affinités entre nos compatriotes qu’avec un Neil Marshall ou un Xavier Gens » (1) -, on ne peut s’empêcher de rapprocher Abandonnée de certaines œuvres de Guillermo del Toro ou Jaume Balaguero, notamment L’Échine du Diable et Fragile. Comme référence, il y a pire !
(1) Propos recueillis par votre serviteur en avril 2008
© Gilles Penso
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