Cinq jeunes gens de 2015 se retrouvent coincés à l’intérieur d’un film d’horreur des années 80 où sévit un tueur psychopathe…
THE FINAL GIRLS
2015 – USA
Réalisé par Todd Strauss-Schulson
Avec Taissa Farmiga, Malin Åkerman, Alexander Ludwig, Nina Dobrev, Alia Shawkat, Thomas Middleditch, Adam DeVine, Angela Trimbur
THEMA TUEURS I CINÉMA ET TÉLÉVISION
Renouveler la mécanique éprouvée du slasher n’est pas une mince affaire pour les scénaristes et réalisateurs qui rivalisent d’énergie afin de s’écarter des sentiers battus tout en respectant les codes du genre. C’est à ce délicat exercice d’équilibristes que se livrent Joshua John Miller et Todd Strauss-Schulson, respectivement auteur et metteur en scène de Scream Girl. Miraculeusement rafraîchissante, cette comédie horrifique donne la vedette à Taissa Farmiga, qui n’est autre que la fille de Vera Farmiga, l’héroïne de la saga Conjuring et de la série Bates Motel. Ironiquement, la jeune actrice incarne dans Scream Girl la fille d’une comédienne spécialisée dans les films d’horreur. Elle se nomme Max Cartwright et sa mère Amanda est passée à la postérité en jouant dans un slasher culte des années 80, « Camp Bloodbath ». Et quoi que cette dernière fasse pour essayer de diversifier sa carrière, tout la ramène toujours à ce rôle qui lui colle à la peau. La mère et la fille sont liées par une forte complicité qui se brise violemment le jour où Amanda perd la vie dans un accident de voiture. Plongée dans une profonde dépression, Max accepte un an plus tard d’assister à une projection de « Camp Bloodbath » organisée par le frère de sa meilleure amie pour honorer la mémoire de sa mère. La soirée commence de manière festive, mais un concours de circonstances provoque un incendie dans la salle de cinéma. Pris dans le mouvement de panique, Max et quatre de ses amis traversent l’écran, seule issue possible… et se retrouvent « de l’autre côté du miroir ».
Présenté dès le prologue de Scream Girl à travers une fausse bande-annonce, « Camp Bloodbath » est une savoureuse parodie des premiers Vendredi 13, qui en reprend la patine, les clichés d’usage et les personnages ultra-stéréotypés. En terrain très familier, le spectateur découvre un groupe de moniteurs de camp de vacances menacés par un tueur fou masqué et armé d’une machette. Même la bande son reprend les célèbres chuchotements conçus par le compositeur Harry Manfredini. Au-delà des méfaits de Jason Voorhees, d’autres références cinéphiliques constellent ce désopilant faux film, notamment Massacre à la tronçonneuse, Carnage ou Les Griffes de la nuit. C’est dans cet environnement très codifié que débarquent nos jeunes héros. Passée la surprise, ils doivent s’accommoder de cet univers factice dont ils font désormais partie. Charge à eux de prévenir les personnages fictifs du danger qui les menace et d’échapper eux-mêmes aux pulsions meurtrières du psycho-killer qui hante les bois…
La dernière fille
Le concept est fou, mené jusqu’au bout par un scénariste qui en exploite toutes les ramifications. Le choc culturel entre les protagonistes des années 2010 et les personnages archétypiques des années 80 est délectable. Les sujets sociaux sont tournés en dérision avec beaucoup d’humour (notamment les clichés machistes), tout comme les « règles du jeu » inhérentes au genre, en particulierla virginité comme seule arme efficace face au tueur. D’ailleurs, si le titre français se réfère un peu artificiellement aux « Scream Queens » et au Scream de Wes Craven, le titre original fait allusion à « la dernière fille », c’est-à-dire la survivante habituelle des slashers qui a su rester prude pendant tout le film et peut se mesurer au psycho-killer au moment du climax. La bride sur le cou, les comédiens improvisent beaucoup avec une bonne humeur très communicative. Mais Scream Girl recèle aussi une profondeur et une finesse inattendues. Derrière le pastiche, le film peut en effet s’appréhender comme une parabole du deuil. Pour la jeune héroïne, faire face au personnage qu’incarnait sa mère et accepter de la voir se faire trucider par cet assassin de cinéma, c’est une manière d’accepter sa disparition dans le monde réel. En écrivant ce scénario, Joshua John Miller reconnaît avoir lui-même pensé au décès de son propre père, le comédien Jason Miller, qui jouait le jeune prêtre de L’Exorciste. L’émotion nous saisit ainsi par surprise aux détours de ce qui s’avère bien plus qu’une simple farce conçue pour flatter les fans du genre.
© Gilles Penso
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