Une adaptation survoltée de la série Drôles de dames dont le cinéaste McG reprend les gimmicks pour nous offrir un spectacle étourdissant
CHARLIE’S ANGELS
2000 – USA / ALLEMAGNE
Réalisé par McG
Avec Cameron Diaz, Drew Barrymore, Lucy Liu, Bill Murray, Tim Curry, John Forsythe, Sam Rockwell, Kelly Lynch, Crispin Glover
Mc G. Derrière ces trois lettres énigmatiques se cache Joseph McGinty Nichol, un réalisateur spécialisé dans le domaine du clip musical et du film publicitaire qui décide en 2000 de s’attaquer à son premier long-métrage : une adaptation sur grand écran de la série télévisée Drôles de dames. La pertinence d’un tel projet ne sautait pas immédiatement aux yeux. D’abord parce qu’à l’époque la plupart des tentatives de passages du petit au grand écran s’étaient soldées par de redoutables échecs artistiques (pour un Fugitif et un Mission impossible réussis, combien comptait-on de médiocres Chapeau melon et bottes de cuir, Wild Wild West, Le Saint ou même Belphégor ?). Ensuite parce que la série originale, pur produit des années 70, avait pris un sacré coup de vieux et avait moins marqué les mémoires pour l’originalité de ses intrigues ou la profusion de ses idées visuelles que pour le charme de ses comédiennes. Or c’est justement là que McG accomplit un véritable miracle. Dynamitant le show original créé par Ivan Goff et Ben Roberts, il en exploite le concept au maximum de son potentiel, n’hésitant jamais à en faire des tonnes dans le domaine des séquences d’action (le « bullet time » de Matrix est passé par là), des effets spéciaux (avec ce plan-séquence d’ouverture hallucinant s’achevant sur un clin d’œil à Mission impossible), de l’humour au second degré (jamais les protagonistes ne se prennent au sérieux) et du sex-appeal de ses trois actrices principales, Drew Barrymore, Cameron Diaz et Lucy Liu.
L’action se situe plusieurs décennies après les faits narrés dans la série TV originale, dont la diffusion s’était arrêtée en juin 1981. L’agence d’espionnage Townsend, dirigée par le mystérieux Charlie, poursuit inlassablement ses activités, recrutant régulièrement de nouveaux « Anges » pour accomplir des missions secrètes souvent délicates et périlleuses. Le nouveau trio d’espionnes aux talents multiples est désormais constitué de Natalie Cook (Cameron Diaz, révélée à l’époque dans The Mask), Dylan Sanders (Drew Barrymore, qui restera pour beaucoup de spectateurs l’éternelle fillette de E.T.) et Alex Munday (Lucy Liu, célébrée pour son rôle récurrent dans la série Ally McBeal). Si le visage de Bosley a aussi changé (l’irrésistible Bill Murray prenant la relève de David Doyle), c’est toujours John Forsythe qui prête sa voix chaleureuse et énigmatique à Charlie. La nouvelle mission des « Anges de Charlie » consiste à mener l’enquête sur la disparition inexpliquée d’un génie de l’informatique, Eric Knox (Sam Rockwell), fondateur et dirigeant de la compagnie Knox Technologies. Apparemment, notre homme aurait été kidnappé par Roger Corwin (Tim Curry), à la tête d’une société de communication par satellite. Les trois espionnes de choc se lancent donc dans une opération dangereuse et mouvementée au cours de laquelle elles se heurtent à un redoutable assassin campé par l’inimitable Crispin Glover, qui fut le père de Marty McFly dans Retour vers le futur…
Le saut des anges
Force est de constater que chacun des 95 millions de dollars investis dans le film est visible à l’écran. Généreux jusqu’à l’outrance, McG sature son film de séquences musclées où l’espionnage, la science-fiction, l’action et la comédie cohabitent avec un rare bonheur, loin de la mise en scène sage et académique de la série d’origine. Pour autant, Drew Barrymore (non seulement comédienne mais aussi et surtout productrice du film) insista pour qu’aucune arme à feu ne soit utilisée par les « Anges », ce qui place Charlie’s Angels à contre-courant de la majorité des blockbusters d’action de l’époque. Soumises à une formation intensive aux arts martiaux pendant les trois mois qui précédèrent le tournage, les trois stars sont épaulées par des seconds rôles masculins de choix. Outre Bill Murray, Tim Curry, Sam Rockwell et Crispin Glover, les amateurs de la série Friends reconnaîtront l’interprète de Joey, Matt le Blanc, dans un registre comique qui lui sied à merveille. Certes, tout n’aura pas été rose pendant le tournage, les défaillances du scénario et la vacuité de certaines répliques ayant même entraîné quelques tensions entre acteurs (Bill Murray et Lucy Liu en tête) que Drew Barrymore et McG s’employèrent à calmer. Crispin Glover lui-même demanda que l’on supprime ses dialogues – jugés ineptes – au profit d’un personnage devenu muet. Réécrit une bonne trentaine de fois par presqu’une vingtaine d’auteurs, ce scénario composite est sans conteste l’un des points faibles du film, et le résultat à l’écran aurait pu frôler l’indigestion. Mais McG parvient à conserver une cohérence parfaite du double point de vue du style et du ton, enthousiasmant un public qui n’en espérait pas tant. Charlie’s Angels sera de fait l’un des champions du box-office américain en l’an 2000.
© Gilles Penso
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