LA POSSÉDÉE (1974)

Une histoire de possession diabolique qui évite pour une fois d’imiter L’Exorciste au profit d’une épouvante poétique teintée d’érotisme

L’OSSESSA

 

1974 – ITALIE

 

Réalisé par Mario Gariazzo

 

Avec Stella Carnacina, Chris Avram, Lucretia Love, Ivan Rassimov, Gabriele Tinti, Luigi Pistilli, Gianrico, Tondinelli, Umberto Raho

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS

Comme bon nombre de ses confrères italiens, le réalisateur Mario Gariazzo a touché à tous les genres (western, policier, aventure et même science-fiction) pour tenter de capitaliser sur les succès américains du moment. Mais en s’attaquant à La Possédée dans le sillage du triomphe de L’Exorciste, il s’est efforcé de doter son œuvre d’une personnalité bien à part. Les nombreuses incursions du long-métrage dans l’érotisme déviant ne se contentent donc pas de répondre à un cahier des charges commercial mais obéissent systématiquement à une fonction scénaristique précise. Lorsqu’une femme de la haute société italienne vit une relation sado-masochiste avec un amant qui la fouette avec des épines de roses, Gariazzo ne se contente pas de flatter les bas instincts de ses spectateurs mais cherche surtout à ancrer ses personnages dans une société bourgeoise décadente dont les perversions se répercutent sur les générations suivantes.

Ce n’est donc pas un hasard si Danila (Stella Carnacina), jeune étudiante en Beaux-Arts, assiste aux ébats dépravés de sa mère et décide d’accuser le choc de cette vision perturbante en se réfugiant dans son atelier pour restaurer un tableau ancien. Là git une sculpture en bois grandeur nature représentant l’un des brigands crucifiés avec le Christ. L’œuvre est troublante de réalisme, et Danila n’est pas insensible au charme étrange de cette sculpture qu’on croirait « née dans l’arbre ». C’est alors que survient une séquence magnifiquement surréaliste. A la manière de Boris Karloff sur la table d’opération du docteur Frankenstein, la sculpture s’éveille lentement. Mi-fascinée, mi-terrifiée, Danila est figée sur place, et le brigand, désormais en chair et en sang, lui arrache sa robe et s’accouple à elle, tandis que la croix sur laquelle il reposait s’enflamme. Lorsqu’elle sort de sa rêverie, Danila est seule dans l’atelier. Etait-ce un rêve ? Une hallucination ? Un fantasme ? La suite du métrage nous apprendra que la semence du démon coule désormais dans ses entrailles.

Le diable au corps

Les passages obligatoires ne tardent pas : la jeune fille perturbée est victime de crises de plus en plus violentes, devient allergique à tous signes sacrés, insulte son entourage, affiche une lubricité qui ne lui ressemble guère (elle propose même à son père de coucher avec elle en affirmant que la notion d’inceste a été inventée par les prêtres !), est soumise à l’examen d’un médecin qui diagnostique des troubles mentaux, puis à l’expertise d’un moine qui entreprend de l’exorciser… Mais une fois de plus, Gariazzo évite les lieux communs par l’élégance stylisée de sa mise en scène et l’absence de recours aux effets choc trop voyants. Certes, le sang coule sur les plaies de la belle lors d’un étrange flash-back où le brigand la crucifie sur sa propre croix, et les phénomènes surnaturels se déchaînent quelque peu pendant le climax. Mais le cinéaste ne cherche jamais à s’engouffrer totalement dans la brèche ouverte par Friedkin, suggérant l’horreur au lieu de l’exhiber, et misant beaucoup sur l’étourdissante photogénie de son actrice principale. Pour sa distribution américaine, La Possédée fut affublée du titre absurde The Eerie Midnight Horror Show ! La France le dota également d’une autre appellation alternative : Exorcisation.

 

© Gilles Penso

 

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