EN PLEIN CAUCHEMAR (1983)

Un film à sketches en quatre parties avec un tueur psychopathe, un jeu vidéo vivant, une voiture diabolique et un rat géant…

NIGHTMARES

 

1983 – USA

 

Réalisé par Joseph Sargent

 

Avec Cristina Raines, Emilio Estevez, Billy Jayne, James Tolkan, Lance Henriksen, Tony Plana, Richard Masur, Veronica Cartwright

 

THEMA TUEURS I JOUETS I MONDES VIRTUELS ET PARALLÈLES I OBJETS VIVANTS I DIABLE ET DÉMONS I MAMMIFÈRES

Au départ, En plein cauchemar est conçu comme le pilote d’une série pour la chaîne NBC, envisagée pour collecter des histoires autonomes sans personnages récurrents, à la façon de La Quatrième dimension. Mais le projet finit par évoluer pour se muer en long-métrage cinéma, dont le studio Universal assurera la distribution. La mise en scène est confiée à Joseph Sargent, spécialisé dans les téléfilms et les séries depuis le début des années soixante. L’homme a tout fait, de Lassie à Bonanza en passant par Daniel Boone, Gunsmoke, Le Fugitif, Star Trek, Des agents très spéciaux ou Les Envahisseurs. Quelques films conçus pour le grand écran émergent de cette longue carrière télévisée, notamment l’effrayante fable de science-fiction Le Cerveau d’acier ou le thriller Les Pirates du métro. En plein cauchemar étant divisé en quatre segments, deux scénaristes se partagent la tâche. Les trois premiers sketchs sont écrits par Christopher Crowe, qui se distinguera plus tard en écrivant le scénario du chef d’œuvre de Michael Mann Le Dernier des Mohicans. Le quatrième est l’œuvre de Jeffrey Bloom, auteur du sympathique La Plage sanglante et futur réalisateur de Flowers in the Attic. Aucun fil conducteur ne relie les quatre courts-métrages, qui sont introduits par l’image forte d’yeux émergeant de ténèbres orageuses (le fameux visuel du poster du film) puis s’enchaînent de manière indépendante.

Le premier segment, « Terror in Topanga », surfe sur la vogue toujours vivace du slasher post-Halloween. Le prologue choc montre un policier assassiné à coups de couteau par un tueur qui vient de s’échapper d’un hôpital psychiatrique. Le même soir, une mère de famille accro à la cigarette (Cristina Raines, vue dans Les Duellistes de Ridley Scott) sort de chez elle pour s’acheter une cartouche dans le magasin le plus proche. Or le tueur rôde tout près… le concept est simple mais efficace, le suspense fonctionne à plein régime et le jeu d’acteur est convaincant. Dommage que l’épilogue mollasson donne le sentiment d’un soufflé qui retombe. Le second sketch, « The Bishop of Battle », semble vouloir s’inscrire dans la continuité de Tron. Un tout jeune Emilio Estevez y incarne un adolescent obsédé par un jeu d’arcade dont il ne parvient jamais à dépasser le douzième tableau malgré sa dextérité. Un soir, n’y tenant plus, il fait le mur de sa chambre, pénètre dans la salle de jeu et défie la machine. La suite bascule dans la science-fiction la plus débridée. C’est de toute évidence l’un des moments forts d’En plein cauchemar. Lance Henriksen tient la vedette de la troisième histoire, « The Benediction ». Prêtre dans une petite paroisse au milieu du désert mexicain, il perd la foi lorsqu’un enfant meurt dans une fusillade. Notre homme rend alors sa soutane, réunit les quelques dollars qu’il possède et prend la route. Mais il est soudain pris en chasse par un 4×4 aux vitres teintées qui veut visiblement sa mort. Le fantasticophile a tôt fait de penser à Duel et Enfer mécanique face à cette situation familière, même si Joseph Sargent ménage quelques images surprenantes (la voiture diabolique qui surgit littéralement des entrailles de la terre), n’est pas avare en cascades et en pyrotechnie, et baigne le segment d’une atmosphère anxiogène où plane aussi l’ombre de L’Exorciste.

Un beau casting sous-exploité

Le quatrième et dernier opus de cette anthologie porte le titre prometteur de « Night of the Rat ». Richard Masur et Veronica Cartwright campent Steven et Claire, un couple qui souffre d’un manifeste manque de communication. Un jour, Claire entend des grattements dans les murs. Persuadée qu’un rat a élu domicile chez eux, elle fait appel à un dératiseur, au grand dam de son époux qui, refusant de voir sa virilité prise en défaut, décide de s’occuper du problème lui-même. Sauf que le rongeur en question est d’un genre très particulier… Plus long que les trois autres, ce segment fait monter l’angoisse en puissance, s’appuyant sur le jeu savoureux de ses comédiens – y compris celui de la petite fille, incarnée avec beaucoup de justesse par Bridgette Andersen. Hélas, le dénouement tombe complètement à plat, en grande partie à cause de ses effets visuels affreusement bâclés. Le bilan est donc globalement très mitigé. Si En plein cauchemar bénéficie d’une mise en scène solide et d’un casting de premier ordre, il se contente la plupart du temps d’emprunter des sentiers battus et se prive souvent de chutes dignes de ce nom. Les spectateurs ne se déplaceront pas en masse pour voir le film, qui connaîtra une seconde carrière plus fructueuse sur le marché de la vidéo.

 

© Gilles Penso

 

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