Un adolescent amateur de films d’horreur soupçonne son nouveau voisin d’être un vampire et commence à mener l’enquête…
FRIGHT NIGHT
1985 – USA
Réalisé par Tom Holland
Avec Chris Sarandon, William Ragsdale, Amanda Bearse, Stephen Geoffreys, Roddy McDowall, Jonathan Stark, Dorothy Fielding
THEMA VAMPIRES I SAGA VAMPIRE, VOUS AVEZ DIT VAMPIRE ?
Talentueux scénariste des Entrailles de l’enfer, Class 1984 et Psychose II, Tom Holland est au travail sur le script du film d’espionnage Cloak & Dagger lorsque lui vient l’idée d’une modernisation du mythe classique du vampire. Son idée tourne autour d’un adolescent persuadé que son voisin de palier est un suceur de sang. L’intrigue commence à prendre forme lorsqu’Holland imagine que le jeune homme, en désespoir de cause, court chercher l’aide d’un acteur spécialisé dans les films d’horreur, une sorte de mixage entre Peter Cushing et Vincent Price. Ainsi naît le personnage de Peter Vincent, ancienne gloire du cinéma fantastique devenu présentateur télé ringardisé. Son dernier scénario ayant été selon lui trahi à l’écran (le film d’horreur La Dernière victime de Michael Winner), Holland souhaite passer lui-même derrière la caméra pour cette histoire de vampire, effectuant ainsi son baptême de metteur en scène. Sur la foi de ses travaux d’écriture précédents, le studio Columbia donne son feu vert. Ainsi démarre le projet Fright Night, que les distributeurs français, dans l’incapacité de retranscrire l’allitération originale, traduiront lourdement par Vampire, vous avez dit vampire ? Aujourd’hui, ce titre français fait partie du culte dont le film est entouré, mais on ne peut s’empêcher de trouver bizarre (c’est le cas de le dire) le fait d’avoir choisi de cligner de l’œil vers un film de Marcel Carné datant de 1938 pour séduire un public ado fan de films d’horreur !
Avec Fright Night, Tom Holland se place en précurseur d’une nouvelle vague de films de vampires qui intègreront les composantes des grands classiques hérités de Bram Stoker tout en se tournant résolument vers un public rajeuni. Génération perdue et Aux frontières de l’aube s’engouffreront dans cette brèche avec le succès que l’on sait. Malgré son approche post-moderne, le film de Tom Holland s’avère finalement très respectueux des codes édictés par « Dracula » en 1897. Les personnages principaux du film sont ni plus ni moins des relectures eighties de ceux du roman. Jonathan et Mina Harker sont devenus deux teenagers s’éveillant à l’amour (William Ragsdale et Amanda Bearse), Van Helsing a pris les traits d’un acteur à la retraite gentiment ridicule (déjà présent dans Class 1984, Roddy McDowall excelle dans le rôle de Peter Vincent), Dracula est désormais un voisin séduisant qui chasse ses victimes dans les clubs disco (Chris Sarandon, ténébreux à souhait) et entretient une relation au sous-texte gay manifeste avec son colocataire Billy Cole (Jonathan Stark), substitut moderne de Renfield. Si l’humour du film est omniprésent, les séquences d’épouvante sont réalisées avec le plus grand sérieux, ce jeu d’équilibrisme étant l’une des clés de l’incontestable réussite de Fright Night.
Monstres et métamorphoses
Chargés de concevoir les créatures et les maquillages spéciaux sous la supervision de Richard Edlund (S.O.S. fantômes), Steve Johnson et Randy Cook se surpassent au cours du dernier tiers du métrage, offrant à nos yeux ébahis une série de séquences délicieusement surréalistes : la métamorphose d’un loup qui redevient humain (sorte de variante perturbante de la transformation du Loup-garou de Londres), la décomposition liquide et poisseuse d’un homme qui retourne à l’état de squelette, un vampire qui se mue littéralement en chauve-souris monstrueuse, ou encore une jeune fille à la bouche soudain démesurée appelée à devenir l’une des images les plus connues du film. « Tom Holland m’avait demandé de maquiller Amanda Bearse pour un plan choc », raconte Randy Cook. « Il m’avait assuré qu’il serait dans le champ uniquement pendant “quelques images“. J’ai donc créé une énorme bouche de requin… C’était un maquillage assez grossier, fait à la va-vite… Je l’ai réalisé en prenant sur mon temps libre, en un week-end. Je savais qu’il n’apparaîtrait à l’écran que dans un flash bref. Mais lorsque j’ai vu le film, j’ai été horrifié : Tom avait tellement aimé ce maquillage qu’il l’avait filmé longtemps, et il n’était vraiment pas assez réussi pour supporter une si longue exposition. Le bouquet final est arrivé au moment de la sortie du film : ce maquillage apparaissait sur l’affiche, occupant un quart de l’espace, en plein milieu ! “Juste pour quelques images“ m’avait-il dit ! » (1) Non content de moderniser et rajeunir la mythologie vampirique, Fright Night lui aura également offert des séquences d’effets spéciaux spectaculaires parfaitement en phase avec l’élan démonstratif caractéristique du cinéma d’horreur des années 80. Le succès colossal du film entraînera une séquelle en 1988 et un remake en 2011.
(1) Propos recueillis par votre serviteur en mai 1999
© Gilles Penso
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