HELLBOY (2019)

Après le diptyque de Guillermo del Toro, « le garçon de l’enfer » imaginé par Mike Mignola ressurgit sous la direction de Neil Marshall

HELLBOY

 

2019 – USA

 

Réalisé par Neil Marshall

 

Avec David Harbour, Milla Jovovich, Ian MacShane, Sasha Lane, Daniel Dae Kim, Thomas Haden Church, Stephen Graham, Dougkas Tait, Penelope Mitchell

 

THEMA SUPER-HÉROS I DIABLE ET DÉMONS I SORCELLERIE ET MAGIE I NAINS ET GÉANTS I ZOMBIES I SAGA HELLBOY

Après la sortie de Hellboy 2 en 2008, l’annonce de la mise en chantier d’un troisième épisode concluant avec panache cette trilogie hors norme se propagea. Guillermo del Toro fut la première source de cette rumeur, qu’il alimenta allègrement via les réseaux sociaux, mais le projet fut sans cesse repoussé. Plusieurs difficultés entravaient ce film, notamment une difficulté croissante pour le cinéaste de se mettre d’accord avec Mike Mignola, le créateur du personnage. Et puis la nouvelle finit par tomber, sans appel : Hellboy 3 ne se ferait pas. C’est Del Toro lui-même qui le déclara officiellement, au grand désarroi de sa vaste communauté de fans. Pour couronner le tout, Dark Horse annonça dans la foulée l’entrée en production d’un reboot reprenant tout à zéro sans qu’aucun membre de l’équipe des deux films précédents ne soit sollicitée. La grogne s’amplifia logiquement, même si deux éléments semblaient susceptibles d’atténuer quelque peu les envolées colériques : le nom du réalisateur et celui de l’acteur principal. C’est en effet le Britannique Neil Marshall, qui sut conquérir le cœur des fantasticophiles avec Dog Soldiers, The Descent et Doomsday, à qui l’on confia le poste de la mise en scène. Après s’être tourné avec succès vers la télévision (il signa notamment des épisodes de Game of Thrones, Hannibal, Westworld et Perdus dans l’espace), Marshall effectuait donc là son grand retour sur grand écran. Face à sa caméra, le maquillage écarlate du « garçon de l’enfer » était porté par David Harbour, coqueluche de toute une génération de spectateurs grâce à sa prestation de shérif dans la série Stranger Things. Certes, ça ne remplaçait pas le duo gagnant Guillermo del Toro / Ron Perlman, mais c’était un lot de consolation acceptable.

Si l’on excepte un prologue bâclé dans lequel les « origines » de la super-vilaine du film sont expédiées au sein d’un flash-back à la direction artistique franchement discutable, cet Hellboy part plutôt bien. Harbour s’approprie pleinement le personnage, dont il propose une prestation moins mâture et plus hargneuse que celle de Ron Perlman, sous un nouveau maquillage signé Joel Harlow. Marshall, de son côté, s’efforce de trouver la bonne tonalité. Assumant un esprit plus rock’n roll que son prédécesseur, il alterne les moments d’humour débridé et de fantasmagorie excessive en poussant assez loin l’aspect horrifique du récit. Morts violentes, membres tranchés, œil crevé, langue arrachée, cadavres déchiquetés, le gore s’invite avec la bénédiction de Mike Mignola et des producteurs qui, depuis les succès respectifs de Deadpool et Logan, n’ont plus peur d’un « comic book movie » qui soit classé R. Ian MacShane reprend avec charisme le rôle paternel jadis tenu par John Hurt et une généreuse sarabande de créatures fantastiques vient égailler les péripéties du film, du démon qui pratique la Lucha Libre à l’homme-sanglier qui massacre les occupants d’un monastère en passant par les trois géants qu’affronte Hlelboy au sein d’un combat virtuose en plan-séquence, l’hideuse Baba Yaga anthropophage qui vit dans une maison sur pattes, les zombies qui surgissent dans la forêt nocturne ou encore les gigantesques abominations qui attaquent Londres et réduisent les habitants en charpie. Bref, Marshall et son équipe assurent le spectacle.

Plus dure sera la chute…

Le problème majeur de cet Hellboy est lié au personnage de la sorcière Nimue. Son interprète Milla Jovovitch n’y est pour rien. Sa beauté altière et sa forte présence sont même des atouts de poids pour personnaliser cette créature surpuissante. Mais dès qu’elle entre en scène, le cinéaste ne sait visiblement plus où donner de la tête, visiblement entravé par un scénario qui ne cesse de se réécrire pendant le tournage. Hélas, comme souvent dans ce type de production, les carences d’écriture sont maladroitement camouflées par un surplus d’effets visuels. Les tics de mise en scène se multiplient dès lors (avec les sempiternels accélérés/ralentis empruntés à 300), les trucages numériques virent à l’orgie digitale et le dernier tiers du film n’est plus qu’un festival pyrotechnique masquant sans succès la vacuité de sa dramaturgie déficiente derrière des rebondissements incessants et des coups de théâtre absurdes. Tout l’édifice bâti par Neil Marshall s’effondre malheureusement comme un château de cartes. L’épilogue lui-même est assez édifiant, cherchant tellement à marcher sur les traces du Marvel Cinematic Universe qu’il nous inflige non pas une mais trois séquences post-générique ! Aucune d’entre elles n’attisa suffisamment l’intérêt du public, qui réserva à ce troisième Hellboy un accueil pour le moins glacial.

 

© Gilles Penso

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