A l’issue d’une guerre ayant ravagé notre planète, un couple est chargé de préparer l’exode de la population vers une lune de Saturne…
OBLIVION
2013 – USA
Réalisé par Joseph Kosinski
Avec Tom Cruise, Morgan Freeman, Olga Kurylenko, Andrea Riseborough, Nikolaj Costner-Waldau, Melissa Leo
THEMA FUTUR
Grand spécialiste des effets numériques et des images de synthèse, Joseph Kosinski fait ses premières armes en réalisant des spots publicitaires intégrant des travaux infographiques élaborés. En 2005, il signe un roman graphique de science-fiction très ambitieux qu’il baptise « Oblivion », dans l’espoir d’en tirer un jour un film. Entretemps, notre homme est contacté par le studio Disney pour mettre son savoir-faire au service de Tron : l’héritage, la séquelle tardive du film culte de Steve Lisberger. Les portes d’Hollywood s’ouvrent alors et son « graphic novel » revient sur le devant de la scène. Tom Cruise le découvre et s’y intéresse de près. Il n’en faut pas plus pour qu’Oblivion devienne un long-métrage ambitieux budgété à 140 millions de dollars. Désireux d’éviter la vision classique des mondes futuristes sombres et claustrophobiques véhiculée par le cinéma de science-fiction depuis le début des années 80, Kosinski cherche au contraire à capter des environnements clairs, vastes et ensoleillés. Il plante donc ses caméras en extérieurs naturels aux États-Unis, en Louisiane et en Islande et imagine des designs futuristes qui privilégient l’épure et la transparence.
Oblivion se déroule en 2077. Après des décennies de guerre acharnée contre le redoutable peuple des « rapaces », les humains ont été contraints d’abandonner la Terre, transformée en désert irradié et jonché de ruines. Alors que la population survivante s’est installée dans une colonie spatiale à destination de Titan, l’une des nombreuses lunes de Saturne, quelques « rapaces » errent encore à la surface de notre planète dévastée. Installés dans une station au-dessus des nuages, Victoria (Andrea Riseborough) et Jack (Tom Cruise) ont pour mission de de protéger les installations chargées d’extraire l’eau de mer qui sera transformée en énergie pour les humains expatriés. Tandis que Jack part régulièrement en expédition pour réparer les drones abîmés et limiter les actes de pillage des « rapaces », Victoria supervise ses opérations depuis leur base céleste. Véritables Adam et Eve de ce nouveau monde, ils forment un couple heureux et parfait surplombant ce qui s’apparente de toute évidence à un Paradis perdu. Mais Jack est régulièrement hanté par des rêves étranges qui semblent appartenir à une autre époque. Le jour où un crash survient sur la Terre, révélant des capsules où gisent plusieurs passagers humains, tout l’univers sur lequel était bâtie la routine de Jack et Victoria est sur le point d’être bouleversé à tout jamais…
Le futur n’est plus ce qu’il était
C’est d’abord la mise en forme du film qui frappe les esprits. Conformément à ses souhaits initiaux, Joseph Kosinski tranche avec les habitudes établies en imposant une vision lumineuse et diurne d’un futur post-apocalytique. Cet écrin édénique entre en adéquation avec le symbolisme biblique de ce couple seul au monde, tout en creusant le décalage entre la réalité telle qu’elle est perçue par nos héros et le monde tel qu’il est vraiment. Car fidèle à un certain cinéma de SF des années 60/70 qu’il affectionne particulièrement (Soleil vert, La Planète des singes), le cinéaste nous prépare une surprise de taille redéfinissant en cours de métrage le rôle de chacun. Citant souvent La Jetée de Chris Marker comme l’une de ses sources d’inspiration, Kosinski s’y réfère notamment au cours des flash-backs énigmatiques narrant une histoire d’amour passée qui semble perdue dans les limbes de l’oubli. Mais le réalisateur n’oublie pas le caractère récréatif de son film qu’il ponctue de séquences de poursuites et de batailles haletantes, s’appuyant sur le design inédit de ses vaisseaux (aux cockpits totalement transparents et à l’architecture mobile) et sur le caractère particulièrement effrayant des drones surveillant la surface de la Terre (leur façade présente une sorte de « grimace » qui évoque le Ed-209 de Robocop et leurs déplacements s’accompagnent de menaçants rugissements mécaniques). Nimbé d’une bande originale envoûtante co-écrite par Anthony Gonzalez et Joseph Trapanese, Oblivion est donc un spectacle science-fictionnel de haute tenue qui bénéficie en outre de l’indiscutable implication physique d’un Tom Cruise alors tout juste quinquagénaire.
© Gilles Penso
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