Les inventifs frères Chiodo imaginent une rencontre du troisième type délirante dans laquelle les envahisseurs extra-terrestres sont des clowns grimaçants
KILLER KLOWNS FROM OUTER SPACE
1988 – USA
Réalisé par Stephen Chiodo
Avec Grant Cramer, Suzanne Snyder, John Allen Nelson, John Vernon, Michael Siegel, Peter Licassi, Royal Dano
THEMA EXTRA-TERRESTRES
Certains films naissent de manière insolite. S’il trottait depuis quelques années dans la tête des frères Chiodo (talentueux créateurs d’effets spéciaux à l’œuvre notamment sur la saga Critters), le projet des Clowns tueurs venus d’ailleurs ne fut pas vendu au producteur Moshe Diamant grâce à un scénario détaillé ou à un casting prestigieux, mais simplement avec la maquette d’un clown armé d’un pistolet futuriste, un poster provisoire et un synopsis de deux pages. « Il a regardé tout ça et nous a dit : “J’adore le titre !“ Et voilà comment les choses se sont passées » (1), raconte Stephen Chiodo. Avec à leur disposition un modeste budget de moins de deux millions de dollars, les trois frères rivalisent d’ingéniosité pour mettre sur pied ce film délirant qui n’est pas à proprement parler une parodie de série B de science-fiction mais un hommage énamouré à tout un pan du fantastique naïf et coloré dont furent bercés Stephen, Edward et Charlie Chiodo pendant leur enfance. Tous les clichés d’usage s’alignent joyeusement sans le moindre cynisme : le jeune couple un peu niais, le vieux fermier, le policier jeune et sympa, son collègue plus âgé et colérique…
Comme dans une infinité de films de science-fiction des années 50, l’intrigue tourne autour d’une petite ville des États-Unis qui subit les outrages d’une invasion extra-terrestre. L’originalité du film – sa raison d’être – réside dans le fait que les aliens ressemblent à des clowns et que toutes leurs armes sont rattachées à l’imagerie du cirque. Le film égrène du coup une série de vignettes qui ne sont pas dénuées de poésie, comme ce chapiteau multicolore qui s’illumine en pleine forêt nocturne ou ce clown qui amuse les badauds avec des ombres chinoises étranges et inquiétantes. Partant du principe qu’un clown est effrayant en dehors de son contexte – Stephen King l’a prouvé avec maestria dans son roman fleuve « Ça » sorti en librairie deux ans plus tôt -, les Chiodo occupent tous les postes clé du film (scénario, réalisation, production, direction artistique, effets spéciaux) pour concevoir une galerie de personnages truculents à la fois comiques et monstrueux, tour à tour risibles et inquiétants.
Klownzilla passe à l’attaque
« Nous rêvions que Klownzilla, le clown géant qui apparaît à la fin du film, soit réalisé en stop-motion », raconte Stephen Chiodo, grand fan comme ses frères des films de Ray Harryhausen. « Mais ça nous aurait pris trop de temps, et ça aurait sans doute coûté plus cher que l’utilisation d’un homme costumé, technique que nous avons finalement choisie. » (2) Au fil du scénario, une intéressante hypothèse est finalement évoquée : ces êtres grotesques, venus d’une autre planète, auraient visité la Terre dans le passé à bord de leur vaisseau-chapiteau et auraient ainsi inspiré aux humains le personnage du clown et l’idée du cirque. Sans doute trop atypique pour faire des éclats au box-office, Les Clowns tueurs venus d’ailleurs sortit discrètement en salle sans attirer les foules. Mais il se transforma quelques années plus tard en objet de culte, non seulement via sa sortie en VHS puis en DVD mais aussi à travers une série de produits dérivés au succès croissant.
(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en avril 2018
© Gilles Penso