LA FUSÉE DE L’ÉPOUVANTE (1958)

Une créature extra-terrestre s'infiltre dans un vaisseau spatial terrien et massacre ses occupants un à un…

IT! THE TERROR FROM BEYOND SPACE

1958 – USA

Réalisé par Edward L. Cahn

Avec Ray Corrigan, Marshall Thompson, Shawn Smith, Ann Doran, Kim Spalding, Paul Langton, Dabbs Greer, Robert Bice

THEMA EXTRA-TERRESTRES

Un an après les inénarrables hommes-choux d’Invasion of the Saucer Men, Edward L. Cahn se lance dans une nouvelle invasion extra-terrestre, mais cette fois-ci la science-fiction grand-guignolesque cède le pas à une épouvante insidieuse. Aidé d’un scénario efficace de Jerome Bixby et d’un casting plutôt solide, il livre ici l’un des ancêtres les plus mémorables de l’Alien de Ridley Scott. On y suit en effet les mésaventures d’une expédition spatiale sur Mars, partie enquêter sur la disparition de l’équipage précédent en cette futuriste année 1973. Sur la planète rouge, ils ne trouvent qu’un survivant traumatisé, le colonel Edward Carruthers, qui crie à qui veut l’entendre que ses collègues ont été exterminés par un monstre sanguinaire. Nos fiers astronautes le ramènent dans leur vaisseau sans accorder le moindre crédit à son histoire, et sur Terre on prépare déjà une cour martiale en guise d’accueil. Mais lors du voyage retour, les membres de l’expédition doivent se rendre à l’évidence : ils ont embarqué avec eux un passager clandestin des plus indésirables, autrement dit une créature extra-terrestre qui va se mettre à les tuer un par un.

L’œuvre surprend par sa maîtrise, quand on la compare aux autres fantaisies d’Edward Cahn, notamment The She-CreatureVoodoo Woman ou Curse of the Faceless Man. Même le maquilleur Paul Blaisdell, d’ordinaire si peu inspiré, livre ici un costume d’extra-terrestre plutôt convaincant, aidé il est vrai par la pénombre dans laquelle il est la plupart du temps plongé. Le vétéran Kenneth Peach, qui fit partie de l’équipe du légendaire King Kong de 1933, pare en effet le film d’une photographie extrêmement soignée, jouant avec talent sur les zones d’ombres et dramatisant à outrance le huis clos où se noue cette tragédie interstellaire. Plus il avance, plus le récit ôte aux protagonistes tout espoir de vaincre le monstre. Car ni les balles, ni les grenades, ni le gaz ne semblent l’importuner outre mesure. Désespérément tenace, la bête continue donc de trucider les hommes qui lui tombent entre les griffes, vidant leur corps de tout le liquide qu’il contient. Le scénario tire donc au mieux parti de cette situation angoissante, y adjoignant en prime une petite rivalité amoureuse. 

L'une des sources d'inspiration d'Alien

Mais il faut bien avouer que cette Fusée de l’épouvante n’échappe guère, au bout d’un moment, à une certaine monotonie, imputable à la répétition incessante des situations et aux limites d’un décor somme toute très restreint. D’autant qu’entre les furtives attaques de la bête, les personnages passent le plus clair de leur temps à se promener dans les étroites coursives et à bavarder, échafaudant des stratégies qui s’avèrent toutes plus inefficaces les unes que les autres. Au passage, on relèvera d’un œil amusé le sexisme typiquement fifties qui plane discrètement sur cette mission spatiale. Car si l’équipage est mixte, chacun reste sagement à sa place. Comme dans cette séquence anodine où les hommes boivent et discutent tandis que les femmes servent le café et font la vaisselle ! Dix ans plus tard, Gene Roddenberry allait enfin bousculer les préjugés avec l’équipage panaché et coloré de Star Trek, faisant fi d’un machisme et d’un racisme alors très ancrés dans les mentalités.

 

© Gilles Penso

Partagez cet article