Une relecture moderne du mythe de La Féline écrite par Stephen King
SLEEPWALKERS
1992 – USA
Réalisé par Mick Garris
Avec Brian Krause, Mädchen Amick, Alice Krige, Jim Haynie, Cindy Pickett, Ron Perlman, Lyman Ward, Dan Martin
THEMA MAMMIFÈRES
Bâti sur un scénario original de Stephen King qui ne provient ni d’un roman ni d’une nouvelle, ce film ressemble à une relecture moderne de La Féline de Jacques Tourneur. Le premier metteur en scène pressenti, qui souhaite réviser l’histoire de fond en comble, ne s’entend pas avec King. En quête d’un remplaçant, l’écrivain pense à Mick Garris dont le téléfilm Psychose 4 lui a fait une excellente impression. Le pré-générique de La Nuit Déchirée se déroule sur la ville côtière de Bodega Bay, décor naturel des Oiseaux d’Alfred Hitchcock et de Fog de John Carpenter. Là, un shérif incarné par Mark Hamill découvre des dizaines de cadavres de chats ainsi que celui d’une fillette en état de décomposition. Voilà une entrée en matière pour le moins accrocheuse ! Puis l’action se transporte dans une petite ville de l’Indiana, Travis, où vivent Charles Brady (Brian Krause) et sa mère Mary (Alice Krige). Tous deux entretiennent une relation incestueuse malsaine, mais ce n’est pas la moindre de leurs bizarreries. En effet, leur apparence humaine n’est qu’une enveloppe trompeuse cachant leur nature réelle, celle de créatures prédatrices nommées les félidés, survivant en se nourrissant de la force vitale de jeunes vierges. Seuls les chats sont capables de les tuer.
L’une des scènes les plus étonnantes du film montre Charles et Mary qui font l’amour dans leur chambre tandis que dans le miroir du placard, ce sont des silhouettes de créatures bestiales qu’on voit enlacées : des espèces de chats humanoïdes et glabres. Les miroirs révèlent en effet leur véritable nature. Leur espèce étant menacée, Charles doit ramener des proies à sa mère pour la nourrir et se met à séduire la jolie lycéenne Tanya Robertson (Mädchen Amick)… A cheval entre deux époques, La Nuit Déchirée ne s’interdit aucun excès et évoque le cinéma d’horreur récréatif des années 80, sa photo, son montage, ses cascades et sa mise en scène semblant se réclamer de cette époque. On pense souvent aux E.C. Comics et à Creepshow. Les maquillages spéciaux eux-mêmes, œuvres de l’atelier Alterian Studio, sont volontairement extrêmes. Mais c’est aussi un film post-Terminator 2 qui s’inscrit dans la révolution numérique et utilise des morphings pour visualiser les métamorphoses de ses créatures.
À cheval entre deux époques
Ce parti pris assez avant-gardiste dote les transformations d’un indéniable dynamisme mais ne restitue pas le côté charnel des effets animatroniques d’un Hurlements ou d’un Loup-Garou de Londres. Un peu trop rapide et instantané, le morphing annihile l’effet horrifique recherché. Volontiers gore, La Nuit Déchirée se pare aussi d’une certain nombre d’effets de mise en scène inventifs, comme le plan séquence révélant le corps d’un policier ou la caméra subjective virevoltante accompagnant le combat dans le cimetière. On sent bien que Mick Garris s’en donne à cœur joie, multipliant la présence de « vedettes invitées » (Stephen King, Clive Barker, Tobe Hooper, John Landis, Joe Dante) et accumulant les séquences outrancières, comme lorsque Mary recoud la plaie de son fils avec du fil et une aiguille après l’avoir griffé, ou lorsque Charles se rend invisible pour passer inaperçu. Envisagé pour le cinéma, La Nuit Déchirée sera finalement diffusé sur les petits écrans américains mais sortira en salle chez nous.
© Gilles Penso
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