Un troisième épisode en forme de prequel dans lequel James Wan cède la mise en scène à Leigh Whannell, plus porté sur le réalisme et l'intimisme
INSIDIOUS CHAPTER 3
2015 – USA
Réalisé par Leigh Whannell
Avec Lin Shaye, Stefanie Scott, Dermot Mulroney, Angus Sampson, Leigh Whannell, Ele Keats, Steve Coulter
THEMA FANTÔMES I DIABLES ET DEMONS I SAGA INSIDIOUS
Affubler une saga d’épouvante d’un troisième épisode en forme de prequel est une habitude qui marque généralement une perte d’inspiration, comme en témoignent pèle mêle Cube zéro, Ring 0, Dragon Rouge ou [Rec] 3 : Genesis. Leigh Whannell, promu réalisateur après le départ de son compère James Wan parti tourner Fast and Furious 7, nous livre pourtant un épisode de haute tenue évitant les écueils de mise en pareille situation. Il s’éloigne d’ailleurs volontairement des effets de style marqués de Wan pour proposer une approche plus classique et plus directe. L’adéquation avec le récit est idéale, puisque le scénario d’Insidious chapitre 3 cherche justement à éviter l’un des défauts de l’épisode précédent, accumulant à outrance les rebondissements et les révélations, pour réduire le nombre de personnages principaux et d’intrigues secondaires et du coup gagner en efficacité.
Marquée par le décès de sa mère et persuadée que celle-ci cherche à lui envoyer un message depuis l’au-delà, la jeune Quinn Brenner (Stefanie Scott) se tourne vers les dons de médium d’Elise Rainier (Lin Shaye). Mais celle-ci ne veut plus communiquer avec les défunts depuis une expérience traumatisante qui l’a marquée à vie. Elle se ravisera en découvrant que Quinn est régulièrement agressée par une entité maléfique capable de s’immiscer dans sa chambre et de la tourmenter jour et nuit. Force est de constater que Whannell a fait le bon choix en optant pour une prequel. Il eut été en effet invraisemblable de faire subir à la famille Lambert, héroïne des deux premiers Insidious, de nouveaux outrages d’origine paranormale, sous peine de sombrer dans le grotesque accumulatif. Se focaliser sur un autre démon tourmentant une autre famille était donc judicieux.
« Quand on communique avec un défunt,
tous les morts entendent… »
D’autre part, les scènes d’épouvante à répétition distillées dans les films précédents étaient astucieusement contrebalancées par la présence de deux jeunes chasseurs de fantôme exubérants, Specs (Leigh Whannell) et Tucker (Angus Sampson), et de la médium Elise. Cette dernière ayant passé l’arme à gauche à la fin du premier Insidious, il était impossible de retrouver ce joyeux trio en respectant la chronologie classique. Le scénario choisit donc de revenir dans le temps, pour faire d’Elise son personnage central, et de nous raconter sa première rencontre avec Tucker et Specs. L’intervention des deux compères en deuxième partie de métrage offre aux spectateurs une respiration humoristique bienvenue. Car par ailleurs, Insidious chapitre 3 ne prête guère à rire. On y parle de maladie au stade terminal, de dépression, de mort, et de nombreuses séquences savent provoquer une de ces peurs primales comme en n’en ressent plus beaucoup au cinéma. Or Whannell ne recours jamais à la violence physique ou au gore, comme s’il voulait prendre le contrepied de la tournure ultra-sanglante prise par la saga Saw qu’il avait initiée avec James Wan dix ans plus tôt. Le pari est réussi : nous ne sommes pas près d’oublier cet horrible démon rachitique au masque respiratoire, ni cette phrase inquiétante d’Elise annonçant à Quinn : « Attention : quand on communique avec un défunt, tous les morts entendent ».
© Gilles Penso
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