MULBERRY STREET (2007)

Les habitants d'un quartier pauvre de New York sont en proie à une mutation qui les transforme en êtres bestiaux et agressifs

MULBERRY STREET

2007 – USA

Réalisé par Jim Mickle

Avec Nick Damici, Kim Blair, Ron Brice, Bo Corre, Tim House, Larry Fleischman, Larry Medich, Javier Picayo, Antoine Pagan

THEMA MUTATIONS I MAMMIFERES

Si, de prime abord, Mulberry Street semble tranquillement emprunter le terrain du film de zombies balisé par George Romero tout en présentant plusieurs similitudes avec [Rec], ce n’est qu’une apparence. Car le premier long-métrage de Jim Mickle, ancien storyboarder et machiniste, prend une tournure très personnelle, via un style naturaliste et libre le rattachant davantage au cinéma indépendant américain qu’au film d’horreur traditionnel. Le cadre de Mulberry Street, comme son titre l’indique, est la rue d’un quartier modeste de New York. Là, dans un immeuble vétuste, des vétérans de guerre, des retraités aux revenus misérables et des marginaux cohabitent et se serrent les coudes. L’un d’eux, l’ancien boxeur Clutch (Nick Damici), attend le retour de sa fille Kay (Bo Corre), blessée sur le front irakien et rapatriée à Manhattan. La canicule gagne la ville, l’immeuble menace d’être rasé par un grand promoteur, et c’est dans cette atmosphère moite et réaliste que s’immisce l’horreur. Car les informations diffusées à la télévision et à la radio relatent une série d’agressions inhabituelles. Plusieurs citoyens auraient été attaqués par des hordes de rats particulièrement agressifs, d’abord dans le métro, puis dans plusieurs quartiers new-yorkais. Plus étrange encore : les victimes des rongeurs se mettent à développer des symptômes qui altèrent leur comportement. Peu à peu, la panique s’installe et la nuit s’apprête à tomber, prélude d’un chaos indescriptible.

Ainsi, si le canevas narratif de Mulberry Street cultive un indéniable sentiment de déjà vu (à la différence près que les contaminés se muent ici progressivement en monstres mi-hommes mi-rongeurs), l’intérêt principal du film et son originalité résident dans son choix de personnages, sa mise en scène à contre-courant de ce qui se pratique généralement dans le genre, et sa description crue et désenchantée d’un quartier défavorisé de la Grande Pomme. La profession ne s’y est pas trompée, sélectionnant le film dans une multitude de festivals à travers le monde et le primant à trois reprises (meilleur film indépendant à Toronto, meilleur film à Amsterdam, meilleur long-métrage au Fantasia Film Festival). La conviction des comédiens est pour beaucoup dans l’impact du film.

Un essai attachant et très personnel

Cependant, Mulberry Street n’est pas dénué de défauts, l’un des plus problématiques étant la maladresse de sa gestion de l’épouvante. Car dès qu’il aborde le genre horrifique frontalement, Jim Mickle témoigne d’un manifeste manque d’inspiration et de savoir-faire. Certes, les attaques de rats et d’humains contaminés ne manquent pas d’impact – notamment grâce à un montage nerveux effectué par Mickle lui-même, à un éclairage composant savamment avec les zones d’ombre et à des maquillages souvent saisissants – mais elles souffrent d’un effet de répétition édulcorant peu à peu leur efficacité. Les courses-poursuites dans les rues nocturnes ou les huis-clos dans l’immeuble palissent donc de la comparaison avec les innombrables films de zombies post-Romero. Pour le reste, voilà un essai filmique attachant et très personnel qui laisse augurer une filmographie prometteuse chez son auteur.

 © Gilles Penso

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