Après le triomphe du 7ème Voyage de Sinbad, le producteur Charles Schneer et le magicien des effets spéciaux Ray Harryhausen s'intéressent à Jonathan Swift
THE THREE WORLDS OF GULLIVER
1960 – GB
Réalisé par Jack Sher
Avec Kerwin Mathews, Jo Morrow, June Thorburn, Lee Paterson, Grégoire Aslan, Basil Sydney, Charles Lloyd Pack, Martin Benson
THEMA NAINS ET GEANTS
Auréolés du succès du 7ème Voyage de Sinbad, le producteur Charles Schneer et le concepteur d’effets spéciaux Ray Harryhausen se lancent dans une adaptation naïve du roman « Les Voyages de Gulliver » écrit par Jonathan Swift en 1726. Après avoir essuyé les refus successifs de Jack Lemon et Danny Kaye, ils proposent à Kerwin Mathews, le rôle du médecin voyageur, auquel le jeune comédien apporte toute la fraîcheur dont il avait su doter Sinbad, en allant même jusqu’à pousser la chansonnette. Dotés d’un budget environ trois fois plus important que celui de Sinbad, Schneer, Ray Harryhausen et l’équipe du film partent tourner dans les mêmes extérieurs espagnols. Au début du film, le docteur Gulliver envisage d’épouser Elizabeth et d’acheter un petit cottage. Il accepte un rôle de chirurgien à bord d’un navire parti pour un long voyage. Après une furieuse tempête, Gulliver est jeté sur le rivage de Lilliput, une île habitée par des hommes minuscules, en guerre contre le royaume insulaire de Blefuscu. Après avoir séjourné quelques temps sur place et avoir mis fin à cette guerre stupide, il prend le large et se retrouve sur l’île de Brobdingnag, habitée par des géants. Là, il retrouve Elizabeth, rejetée comme lui par les flots, et l’épouse sur place. Attaqué par un écureuil géant, traité de sorcier par l’alchimiste local, livré à un crocodile énorme, Gulliver s’échappe avec Elizabeth à bord d’un panier jeté dans une rivière…
Si l’épisode sur Lilliput (pour les besoins duquel Mathews passe huit heures consécutives attaché sur la plage brûlante de La Conca) demeure très fidèle au texte original, les rabelaiseries en moins, la seconde partie, en revanche, est presque entièrement réécrite. Quant aux autres voyages de Gulliver, ils ont ici été écartés. Les effets spéciaux de Ray Harryhausen concernent surtout les mises en relation de nains et de géants, avec force maquettes, décors surdimensionnés, perspectives forcées et plans composites optiques tous très réussis. « Nous avons décidé de réduire au maximum les séquences d’animation, pour éviter de passer trop de temps sur ce film, et parce que nous préférions utiliser de véritables acteurs pour les nains et les géants » (1), nous explique Harryhausen.
Quelques monstres géants
Les deux seules créatures animées du film, un écureuil géant et un crocodile, interagissent de près avec les comédiens via des astuces visuelles qui, aujourd’hui encore, frappent par leur habileté. Les corps à corps entre le saurien et le comédien, notamment, regorge de tours de passe-passe étonnants. En ce qui concerne le récit, on peut regretter quelques ellipses vertigineuses qui entravent la cohérence et l’unité de la narration, en particulier au moment où le héros retrouve sa femme. Bernard Herrmann composa pour le film une nouvelle partition enjouée et empreinte de classicisme, qu’il avoua préférer à celle de Sinbad. Lorsque Les Voyages de Gulliver sortit aux Etats-Unis, il bénéficia de très bonnes critiques et d’une assez grande promotion en plein Thanksgiving. Son score au box-office s’avéra très honorable, sans atteindre cependant celui de Sinbad.
(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2004.
© Gilles Penso
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