Un road movie intimiste sur fond d'une pandémie planétaire qui décime peu à peu toute la population…
CARRIERS
2010 – USA
Réalisé par David et Alex Pastor
Avec Lou Taylor Puci, Chris Pine, Piper Perabo, Emily VanCamp, Christopher Meloni, Kiernan Shipka, Ron McClary, Mark Moses
THEMA CATASTROPHES I MUTATIONS
Depuis le choc que Danny Boyle nous asséna avec 28 jours plus tard, les contaminés n’en finissent plus d’envahir les écrans. Mais Infectés se démarque de cette cohorte contagieuse par la teneur de son propos et sa tonalité générale. Au lieu d’opter pour la surenchère, Alex et David Pastor, qui réalisent là leur premier long-métrage, évacuent toute référence à George Romero et Richard Matheson pour nous offrir un « road movie post-apocalyptique intimiste ». Les duettistes ont tout de même une influence cinématographique apparente : Mad Max 2 auquel ils rendent hommage dès les premières minutes par l’entremise du tag « The Road Warrior » ornant fièrement le capot de la voiture des héros.
Lorsqu’Infectés commence, un virus mortel s’est déjà installé partout. L’intrigue se centre donc sans préambule sur deux jeunes couples taillant la route en quête d’essence, de nourriture et d’un éden hypothétique. Chris Pine et Lou Taylor Pucci incarnent Brian et Danny, deux frères extrêmement dissemblables mais liés par une forte complicité, comme en témoignent ces extraits de films super 8 évoquant furtivement une enfance heureuse et désinvolte. Leurs compagnes d’infortune sont interprétées par Piper Perabo et Emily VanCamp, deux filles de générations et de caractères divergents, dont la personnalité va progressivement s’affirmer face à l’adversité. C’est sur une plage du golfe du Mexique, celle où Brian et Danny vécurent leurs vacances insouciantes, que les quatre jeunes gens comptent couler des jours paisibles en attendant une éradication présumée du fléau. Leur route sera semée de rencontres imprévues et de choix qui risquent de les marquer à tout jamais.
La monstruosité des survivants
Aucun monstre ne vient hanter Infectés, les gens frappés par le virus n’étant que de tristes victimes condamnées à se décomposer lentement dans d’atroces souffrances. Le schéma habituel du film de zombies n’est donc pas de mise. La monstruosité est pourtant omniprésente dans le métrage, à travers le comportement qu’adoptent les survivants – souvent à contrecœur – dans l’espoir souvent vain d’attiser le plus longtemps possible l’étincelle de leur sinistre existence. Voilà toute la richesse et la complexité de cette remarquable première œuvre, qui s’affirme comme un véritable coup de maître. Dans Infectés, la menace réside en chacun de nous, non sous forme d’une mutation ou d’une métamorphose incontrôlable, mais via un instinct de survie bafouant allégrement tout code moral. La culpabilité, l’hypocrisie, l’égoïsme, le sens du sacrifice, les crises de conscience sont au cœur d’un récit désespérément universel. Pourtant, Infectés ne se complaît pas dans la noirceur ou le misérabilisme. La dynamique du « road movie » insuffle au métrage une énergie positive qui ne le prive jamais de ses vertus divertissantes. Les kilomètres défilent donc à travers le désert, tandis que l’innocence des protagonistes s’estompe et que leurs liens s’étiolent. Infectés est aussi le portrait désenchanté d’un couple fraternel partagé entre la connivence et les discordances, le réalisme de leurs relations ayant probablement été alimenté par les souvenirs communs des deux réalisateurs.
© Gilles Penso
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