DONJONS ET DRAGONS (2000)

Conçue dans la précipitation pour pouvoir anticiper la sortie du Seigneur des Anneaux, cette vague adaptation du célèbre jeu de rôle offre à Jeremy Irons le pire rôle de sa carrière

DUNGEONS & DRAGONS

2000 – USA / TCHECOSLOVAQUIE

Réalisé par Courtney Solomon

Avec Jeremy Irons, Bruce Payne, Justin Whalin, Marlon Wayans, Robert Miano, Tomas Havrlik, Thora Birch, Edward Jewesbury

THEMA HEROIC FANTASY I DRAGONS

Produit à la va vite pour pouvoir sortir avant le premier épisode de la trilogie Le Seigneur des Anneaux, ce Donjons et Dragons, vaguement inspiré du jeu de rôle créé par E. Gary Gigax, est un calamiteux fourre-tout dénotant une parfaite méconnaissance du genre qu’il est censé illustrer. Car l’héroïc-fantasy de pacotille qui sert de prétexte au film semble de toute évidence s’adresser à une cible bien spécifique : les teenagers amateurs de fast food et de jeux vidéo. D’où de jeunes protagonistes balourds, un humour éléphantesque et des péripéties désespérément puériles. Œuvre de Topper Lilien  et Caroll Cartwright (co-auteurs d’En toute complicité avec Paul Newman et Linda Fiorentino), le scénario nous familiarise avec l’empire d’Izmer, menacé d’un terrible chaos si l’impératrice Savina (Thora Birch) refuse de donner son sceptre au redoutable Profion (Jeremy Irons). La guerre est donc sur le point d’éclater, et il semble bien que le sort du monde repose sur les épaules de deux jeunes et sympathiques voleurs, Snails (Marlon Wayans) et Ridley (Justin Whalin), accompagnés dans leur quête par Marina (Zoe McLellan), qui appartient à la puissante Congrégation des Mages. Avec l’aide d’un antique manuscrit, tous trois déjouent les traquenards et les multiples complots ourdis contre eux. Le terrible affrontement qui se prépare sollicitera la ruse, les sortilèges, ainsi qu’une armada de dragons volants prêts à s’entretuer pour l’avenir du royaume d’Izmer.

Ce récit simpliste, qui semble maladroitement marcher sur les traces de Star Wars, est tout de même émaillé d’une poignée de moments inventifs propres à susciter l’intérêt, comme ce parcours du combattant semé de pièges surprenants qui menacent les héros. Mais avec Joel Silver derrière le tiroir-caisse, on s’attendait à plus de panache du côté des séquences d’action. Les dragons du titre représentent à vrai dire de belles réussites numériques, inspirées par le décidément incontournable Dragon du lac de feu. Hélas, le climax, qui avait de quoi allécher le plus blasé des spectateurs puisqu’il consiste en un gigantesque affrontement en plein ciel entre plusieurs centaines d’entre eux, ajoute à la déception globale que provoque ce terrible nanar. Car la frénésie, le vacarme et le mauvais goût visuel prennent le pas sur le rythme, l’emphase et le spectaculaire.

 

Frénésie, vacarme et mauvais goût

Le plus triste, c’est finalement de retrouver Jeremy Irons en tête d’affiche de ce Donjons et Dragons. Probablement échoué là par erreur, par hasard ou par la nécessité bien compréhensible de payer ses impôts, ce comédien pourtant généralement respectable cabotine à outrance et éclate de rire bien fort face à la caméra pour nous faire comprendre que c’est lui le méchant de l’histoire. Le scénario l’affuble même de répliques humoristiques du plus curieux effet, comme lorsqu’il déclare à l’un des jeunes voleurs « pas si talentueux que ça, monsieur Ridley », en un clin d’œil pataud et anachronique au Talentueux Monsieur Ripley. Après cette rude mise à l’épreuve d’un public amateur de mythes et de fantaisies, il était temps que Peter Jackson vienne redorer le blason d’une héroïc-fantasy rarement aussi malmenée.

 

© Gilles Penso

Partagez cet article