Un slasher parodique, déjanté et survitaminé, porté à bout de bras par son réalisateur Joseph Khan
DETENTION
2011 – USA
Réalisé par Joseph Khan
Avec Shanley Caswell, Alison Woods, Josh Hutcherson, Marque Richardson, Parker Blagley, Spencer Locke
THEMA TUEURS I VOYAGES DANS LE TEMPS
Auréolé du prestige acquis sur la réalisation de clips musicaux pour Rihanna, Mariah Carrey, Britney Spears, U2, George Michael, The Black Eyed Peas et Kylie Minogue (entre autres), Jonathan Khan tourne avec Torque, en 2004, son premier long-métrage à Hollywood, « une expérience horrible », dixit l’intéressé. Et aussi une histoire de bikers et de trafiquants de drogue qui sort sous les quolibets et fait un flop. Dur, après ça, d’embrayer sur un deuxième film. « J’ai mis trois ans à m’en remettre », avoue le réalisateur. Tandis qu’il continue à sévir dans la pub (Budweiser, Renault, PlaySation…) et le clip, Joseph Khan tente ensuite de convaincre des producteurs d’investir dans un projet de slasher parodique, Detention. Il n’essuie que des refus. En désespoir de cause, il contracte des crédits, puise dans ses économies, trouve des partenaires et, au final, relève le défi qu’il s’était fixé quelques années plus tôt. En 2011, Joseph Khan atteint enfin son but : il tourne Detention, son Scream à lui, bien plus déjanté et vitaminé que ceux de Wes Craven. Comme dans Scream, il est effectivement question d’un serial killer ultra référencé dans Detention, réplique trash de celui du Bal de l’horreur et de son remake. Dès la première séquence, il coupe la gorge à une pétasse blonde. Et, régulièrement, intervient dans un scénario pour le moins délirant, constamment relancé par des trouvailles inattendues, des parenthèses imprévisibles.
Car, dans ce slasher au second degré, il est aussi question de voyage dans le temps (grâce à un mannequin d’ours équipé pour !) et de transfert de corps (une fille et sa mère). C’est dire que l’histoire qu’illustre Joseph Khan est absolument irracontable, si grouillante d’idées qu’elle semble exploser dans toutes les directions. Disons qu’elle s’appuie sur Riley Jones, une adolescente un peu boulotte, éprise de Clapton Davis, un lycéen que ne lâche pas Taylor Fischer, la meneuse peroxydée (évidemment…) des pom-pom girls de Grizzly Lake. Avec également un sportif bas du plafond (héritier de La Mouche et d’Edward aux mains d’argent), une gothique black lymphatique, quelques autres teen-agers volontairement stéréotypés et un prof gay, le script se complique, quand, dans la dernière partie, le récit remonte jusqu’aux années 80 et implique de nouveaux enjeux, dont une fin du monde programmée à 1992.
Retour vers les années 80
Plein d’occasions, pour Joseph Khan et ses complices, de multiplier des citations et clins d’oeil plus ou plus décelables. Quelques-uns d’entre eux : Donnie Darko, Scream, Retour vers le Futur, Karaté Kid, Steven Seagal, Kevin Costner, The Faculty, Saw, Scott Pilgrim, Breakfast Club et ses heures de colle, Matrix, Volcano, Star Trek, Dirty Dancing, la série Angela, 15 ans, E.T.… Le réalisateur cite même son Torque qu’il qualifie de navet, décrypte les règles du thriller horrifique adolescent. En résumé, la moulinette fonctionne à plein rendement, d’autant mieux que le réalisateur imprime au jeu de massacre un rythme infernal, multiplie les digressions démentes, dont l’intervention d’une puissance extraterrestre. Insolent, tapant sur tout ce qui bouge, Joseph Khan ose à peu près tout dans Detention, un film libre d’aller au gré de son inspiration. Il ose même avec un punch assez inouï, une virtuosité technique percutante et des « trucs » directement empruntés à son expérience du clip et de la pub. Rien de gratuit cependant, aucune esbroufe tant le fond dicte au spectacle la forme qu’il doit prendre. Ceci dès la première séquence (où la comédienne s’adresse à la caméra) et un générique dont les noms s’inscrivent dans le décor, notamment une pissotière constellée de vomis pour celui de Joseph Kahn ! Puissante, cadencée, inventive, la musique du tandem Brain & Melissa contribue à la réussite de cet éblouissant exercice de style, auquel il imprime d’ailleurs son tempo.
© Marc Toullec
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