Un brave Saint-Bernard se transforme en monstre assoiffé de sang dans cette adaptation d'un célèbre roman de Stephen King
CUJO
1983 – USA
Réalisé par Lewis Teague
Avec Dee Wallace, Christopher Stone, Daniel Hugh-Kelly, Danny Pintauro, Ed Lauter, Kaiulani Lee, Billy Jane, Mills Watson
THEMA MAMMIFERES I SAGA STEPHEN KING
Publié partiellement sous le titre « The Monster in the Closet » puis dans son intégralité en 1981, « Cujo » est souvent considéré comme l’un des romans les plus terrifiants de Stephen King. Les succès de Carrie, Shining et Christine aidant, ce bon vieux routard de Dino de Laurentiis n’attendit guère pour s’attaquer à son tour à la poule aux œufs d’or. Il confia donc la mise en scène de Cujo à Lewis Teague, auteur de L’Incroyable alligator, et le scénario à Don Carlos Dunaway et Lauren Currier, spécialisés dans la série TV. Ces derniers simplifient le récit initial et évacuent ses éléments surnaturels pour se concentrer sur le personnage de Donna Trenton. Interprétée par Dee Wallace, valeur sûre du cinéma fantastique depuis Hurlements et E.T., cette femme au foyer partage son temps entre son époux Vic (Daniel Hugh Kelly), absorbé par son envahissant travail de publicitaire, son fils Tad (Danny Pintauro), effrayé par d’hypothétiques monstres dans le placard de sa chambre, et son amant Steve (Christopher Stone, le véritable époux de la comédienne) avec qui elle souhaite rompre.
La première partie du film brosse ainsi des portraits de la vie quotidienne américaine, dans l’éternelle petite ville de Castle Rock. Pas passionnante outre mesure, cette introduction bénéficie toutefois de l’indéniable conviction de ses comédiens, et sème les graines du cauchemar à venir. Lorsque Vic découvre l’infidélité de son épouse, il part travailler à l’autre bout du pays, tandis que Donna et son fils emmènent leur vieille voiture en panne chez le garagiste Camber. Or la séquence prologue du film nous a annoncé que Cujo, le brave Saint-Bernard de Camber, filait un mauvais coton. En effet, après avoir coursé un lapin à travers bois, il a plongé sa grosse tête dans une caverne avant de se faire mordre par une chauve-souris. Le toutou ne s’est pas converti au vampirisme pour autant, mais désormais il est enragé et mû par une inquiétante folie meurtrière. Son maître et un voisin ont déjà péri sous ses crocs baveux, et Cujo rôde désormais dans le garage. En découvrant que le Saint-Bernard s’est mué en monstre, Donna et Tad décident de prendre la poudre d’escampette, mais leur voiture refuse de démarrer. Et s’ils mettent un pied dehors, le molosse ne fera d’eux qu’une bouchée.
Le T-Rex de Jurassic Park avec dix ans d'avance…
Voilà donc le huis clos installé, et Lewis Teague réussit l’exploit de centrer désormais toute l’action du film autour d’une situation aussi basique, effrayant son spectateur à plus d’une reprise et annonçant avec dix ans d’avance la fameuse scène de tyrannosaure sur la route de Jurassic Park. Le concept est simple mais fort, et fonctionne presque aussi bien que dans le livre, d’autant que le chien est hideux à souhait : sali, le poil hirsute, la bave aux lèvres, les mâchoires menaçantes… L’exploit est d’autant plus notable qu’un Saint-Bernard suscite par nature beaucoup de sympathie. La mise en scène extrêmement efficace s’assortit d’une photographie très soignée, œuvre d’un Jan de Bont qu’on retrouvera une décennie plus tard aux commandes de Speed et Twister. Quant à Teague, ce sera son seul vrai titre de gloire, ses autres films n’étant guère passés à la postérité. Dommage que le final, très abrupt, n’ait pas osé reprendre la noirceur du texte de King pour s’acheminer vers une conclusion plus classique.
© Gilles Penso
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