BLACK WATER (2007)

Un film de crocodile tueur et vorace qui tire toute son efficacité d'une approche ultra-réaliste

BLACK WATER

2007 – AUSTRALIE

Réalisé par Andrew Traucki et David Nerlich

Avec Diana Glenn, Maeve Demody, Andy Rodoreda, Ben Oxenbould, Fiona Press

THEMA REPTILES ET VOLATILES

« Dans le nord de l’Australie, le nombre de crocodiles d’eau de mer augmente au même rythme que la population » nous dit le texte d’introduction de Black Water, avant d’annoncer : « ce film s’inspire d’une histoire vraie. » Entièrement tourné en décors naturels, avec un budget équivalent à un million de dollars, ce petit film d’épouvante et de suspense sacrément bien troussé s’efforce de traiter ses protagonistes et son monstre avec un maximum de réalisme. Grace, son petit ami Adam et sa sœur cadette Lee partent en vacances dans le nord sauvage de l’Australie. Après une visite dans une ferme de crocodiles, ils s’en vont pêcher dans les mangroves en compagnie d’un guide local. La détente est hélas de courte durée, car un crocodile énorme et vorace renverse leur petite embarcation, les obligeant à se réfugier de toute urgence sur un arbre. Piégés, ils cherchent dès lors un moyen de s’échapper, mais le prédateur semble bien décidé à les caler les uns après les autres au fond de son estomac.

La situation est donc ultra-simple, mais le scénario l’exploite sous toutes ses latitudes et sait tirer au mieux parti de l’unité de lieu, d’action et de temps. Rigoureuse et millimétrée, la mise en scène d’Andrew Traucki et David Nerlich s’interdit quant à elle le recours aux effets spéciaux et au gore, ce qui peut surprendre dans un tel contexte. Là où les « monster movies » aux sujets voisins usent abondamment de créatures animatroniques, d’images de synthèse et de maquillages spéciaux saignants, Black Water n’emploie que des crocodiles réels, filmés dans leur environnement naturel, et ne met en scène que des morts réalistes (la plupart d’entre elles ayant lieu hors champ). Pour autant, le résultat n’a rien d’austère. Le museau du monstre émergeant lentement des eaux calmes fait toujours son petit effet, et les séquences d’attaque savent solliciter notre adrénaline avec succès. Tous les plans combinant les acteurs et le crocodile sont des composites bricolés avec des bouts de fond bleu et des détourages sur ordinateur, et il faut bien reconnaître que la qualité du rendu est absolument remarquable. Voilà toute la force de cette œuvrette modeste : appuyer ses séquences de tension et d’angoisse sur une menace crédible et palpable. Nous sommes donc à cent lieues des Crocodile de Nu Image ou du Blood Surf d’Anthony Hickox.

Qui finira entre les dents du saurien ?

Pour couronner le tout, Black Water (dont le titre semble volontairement faire écho à Open Water) s’assortit d’une bande originale atmosphérique de Rafael May volontiers envoûtante et d’une magnifique photographie de John Biggins, laquelle s’attarde parfois en macro sur des insectes pris au piège dans une toile d’araignée ou une colonne de fourmis transportant le cadavre d’une libellule, métaphore à petite échelle d’une nature impitoyable laissant peu de chance aux faibles. Qui survivra et qui finira entre les dents du saurien ? Telle est l’inévitable question qui trotte dans la tête du spectateur, et les réponses sont souvent inattendues. Voilà donc un film de monstre atypique et très recommandable, qui semble se positionner sur le même territoire que le Solitaire de son compatriote Greg McLean, avec un budget pourtant vingt fois moins conséquent.  


© Gilles Penso


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