L'un des films les plus gore, les plus excessifs et les plus malsains de Joe d'Amato
ANTHROPOPHAGUS
1980 – ITALIE
Réalisé par Joe d’Amato
Avec Tisa Farrow, Saverio Vallone, Serena Grandi, Margaret Donnelly, Mark Bodin, George Eastman
THEMA CANNIBALES
Joe d’Amato n’a jamais été réputé pour son bon goût ni son sens de la demi-mesure, et c’est probablement dans ce film qu’il atteint le sommet de son « art ». George Eastman, halluciné et fort inquiétant, y campe Nikos Karamanlis, le survivant d’un naufrage obligé de dévorer sa femme et son fils pour ne pas mourir de faim. Forcément, avec un tel passif, difficile de poursuivre une vie équilibrée. Lorsque nous le retrouvons quelques années plus tard sur une île de la mer Egée, il n’a effectivement plus grand-chose d’humain. Le crâne rugueux, le teint blafard, la barbe abondante, le regard fou et la démarche zombiesque, notre cannibale est retourné à l’état de bête sauvage. Au moment où trois couples de touristes débarquent innocemment sur l’île en question et découvrent avec stupeur un village désert laissé à l’abandon, on imagine aisément la suite du programme. D’autant que l’une des femmes du groupe, médium a ses heures, a prévu le pire en tirant les cartes du tarot avant leur arrivée sur l’île.
Le massacre qui s’ensuit est donc très prévisible, et ne génère pas vraiment de surprise, jouant sur la mécanique ennuyeuse de l’errance des personnages n’en finissant plus de se chercher les uns les autres et trépassant à tour de rôle de fort sanglante manière. L’intrigue se pare malgré tout de quelques moments de suspense plutôt efficaces. Notamment lorsque l’anthropophage affamé avance inexorablement vers un des jeunes protagonistes, tranquillement allongé, un casque de walkman sur les oreilles, sourd à la mort brutale qui s’apprête à le frapper. Au sommet d’une colline, dans la chambre cachée d’une vieille demeure abandonnée, les victimes du monstre trouvent une jeune fille aveugle terrorisée, seule survivante d’un innommable carnage, qui décrit la bête qui rôde aux alentours comme « un homme qui a une odeur de sang ». Nos protagonistes découvrent également sur place un journal de bord qui relate à la première personne la terrible mésaventure de Karamanlis, puis sa métamorphose progressive en prédateur cannibale.
L'homme qui se mangeait lui-même
Là où Anthropophagous bat tous les records, c’est en matière d’horreur malsaine mâtinée de grand-guignol. Les chairs sont déchirées, le sang coule à flot, les têtes coupées flottent dans des seaux d’eau, une femme est même scalpée à mains nues. Comme chez Lucio Fulci, les séquences gore sont dénuées de concession et volontairement extrêmes, mais souvent desservies par des effets spéciaux approximatifs pas vraiment performants. Le sommet de ces abominations est atteint dans une séquence devenue mémorable où Eastman arrache le fœtus d’une femme enceinte pour le dévorer à belles dents ! Il fallait oser, et personne ne se permettrait de filmer de telles choses aujourd’hui. Le final lui aussi est assez gratiné, puisque notre insatiable cannibale, éventré à coup de pioche par l’un des survivants, empoigne ses propres entrailles pour les mastiquer avec appétit, en un ultime réflexe de survie. Totalement interdit sur le territoire britannique pendant de longues années, Anthropophagous est donc le film de tous les excès, ces débordement gore masquant à peine, il faut bien l’avouer, un scénario, une mise en scène et une interprétation d’assez médiocre facture.
© Gilles Penso
Partagez cet article