2010, L’ANNEE DU PREMIER CONTACT (1984)

Miraculeusement, Peter Hyams réussit à doter le chef d'œuvre de Stanley Kubrick d'une séquelle magistrale se déployant sur le terrain de la politique-fiction

2010, THE YEAR WE MAKE CONTACT

1984 – USA

Réalisé par Peter Hyams

Avec Roy Scheider, John Lithgow, Helen Mirren, Bob Balaban, Keir Dullea, Madolyn Smith, Dana Elcar, Taliessin Jaffe

THEMA FUTUR I SPACE OPERA

En 1983, Richard Franklin osait l’un des paris les plus risqués de l’histoire du cinéma en réalisant une suite de Psychose, s’en tirant sans génie, certes, mais avec les honneurs. Un an plus tard, Peter Hyams s’empare d’un autre classique intouchable des années 60, 2001 l’Odyssée de l’espace, et le dote d’une séquelle en tout point remarquable. Il faut dire qu’Hyams n’en est pas à sa première tentative dans le domaine de la science-fiction réaliste, novatrice et quelque peu subversive, comme en témoignent Capricorn One et Outland. Ici, il s’appuie sur un roman d’Arthur C. Clarke, « 2010 : Odyssée Deux », et marque une rupture volontaire de ton avec Kubrick, éclaircissant quelques points d’ombre du film précédent et collant de plus près aux préoccupations géopolitiques du moment. Car le début des années 80 marquait un regain d’intensité inquiétant de la guerre froide russo-américaine et une course à l’armement alarmante entre l’Est et l’Ouest. D’où une vogue de films catastrophes ouvertement pessimistes tels que Le Jour d’après, Le Dernier Testament ou la mini-série La Troisième Guerre Mondiale

2010 prend un parti différent et nous fait découvrir l’impressionnant vaisseau spatial Leonov, dont l’équipage russo-américain navigue vers Jupiter à la recherche du Discovery, mystérieusement disparu en 2001. Tandis que les navigateurs russes assurent la bonne marche du Leonov, les scientifiques américains ont été plongés en hibernation. Mais un mois avant la date prévue, on réveille son chef, Heywood Floyd (Roy Scheider). La mission prend une tournure inattendue. D’abord intervient le monolithe noir extra-terrestre, dont les intentions semblent incompréhensibles. Puis éclate la guerre entre Russes et Américains sur Terre, ce qui oblige l’équipage à se séparer et provoque de nombreuses tensions. Et voici qu’apparaît David Bowman (Keir Dullea), l’astronaute disparu neuf ans plus tôt dans le Discovery, pour prévenir Floyd qu’il faut s’éloigner de Jupiter avant deux jours, car « une chose merveilleuse » va arriver…

« Une chose merveilleuse va arriver… »

Porté par un excellent casting aux allures spielbergiennes (l’excellent Scheider et le lunaire Balaban sont respectivement transfuges des Dents de la mer et Rencontres du troisième type2010 regorge de remarquables partis pris artistiques et narratifs, preuve que Peter Hyams était alors au faîte de son inspiration (quel dommage qu’un homme si talentueux se soit peu à peu mué en faiseur anonyme à la solde du cinéma d’action hollywoodien décérébré !). Et si 2001 l’Odyssée de l’Espace demeure une œuvre inégalée, somptueuse et révolutionnaire (en avance de plusieurs mois sur les premiers pas de l’homme sur la Lune), 2010 se présente comme une alternative moins hermétique et plus portée sur la narration que la contemplation, sans se soustraire pour autant aux développements métaphysiques inhérents à son postulat. Orné de sublimes effets visuels plongeant les vaisseaux spatiaux dans des semi-ténèbres extrêmement réalistes, 2010 s’achève sur un dénouement magnifique dont les répercussions résonnent dans l’esprit du spectateur longtemps après le générique de fin.

 

© Gilles Penso

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